Download PDF
ads:
Ce document est extrait de la base de données
textuelles Frantextalisée par l'Institut National de la
Langue Française (InaLF)
Théorie analytique des probabilités [Document électronique] / par M. le Comte
Laplace
p1
Je me propose d' exposer dans cet ouvrage, l' analyse et les
principes cessaires pour soudre les problèmes concernant les
probabilités. Cette analyse se compose de deux théories que j' ai
données, il y a trente ans, dans les moires de l' académie des
sciences. L' une d' elles est la théorie des fonctions
génératrices : l' autre est la théorie de l' approximation
des formules fonctions de très-grands nombres . Elles sont l'
objet du premier livre, dans lequel je les présente d' une
manière encore plus générale que dans les mémoires cités. Leur
rapprochement montre avec évidence, que la seconde n' est qu' une
extension de la première, et qu' elles peuvent être consies
comme deux branches d' un même calcul, que je désigne par le nom
de calcul des fonctions génératrices . Ce calcul est le
fondement de ma théorie des probabilités , qui fait l' objet
du second livre. Les questions relatives aux événemens dus au
hasard, se ramènent le plus souvent avec facilité, à des
équations linéaires aux différences simples ou partielles : la
première branche du calcul des fonctions génératrices donne la
p2
thode la plus générale pour intégrer ce genre d' équations.
Mais quand les événemens que l' on considère, sont en grand
nombre, les expressions auxquelles on est conduit, se composent
d' une si grande multitude de termes et de facteurs, que leur
calcul numérique devient impraticable ; il est donc alors
indispensable d' avoir une thode qui les transforme en séries
convergentes. C' est ce que la seconde branche du calcul des
fonctions génératrices fait avec d' autant plus d' avantage, que
la méthode devient plus nécessaire. Mon objet étant de présenter
ici les méthodes et les résultats généraux de la théorie des
probabilités, je traite spécialement les questions les plus
délicates, les plus difficiles, et en même tems les plus utiles
de cette théorie. Je m' attache surtout, à déterminer la
ads:
Livros Grátis
http://www.livrosgratis.com.br
Milhares de livros grátis para download.
probabilité des causes et des résultats indiqués par les
événemens considérés en grand nombre, et à chercher les lois
suivant lesquelles cette probabilité approche de ses limites, à
mesure que les événemens se multiplient. Cette recherche mérite
l' attention des omètres, par l' analyse qu' elle exige : c'
est là principalement que la théorie de l' approximation des
formules fonctions de grands nombres, trouve ses applications les
plus importantes. Cette recherche intéresse les observateurs, en
leur indiquant les milieux qu' ils doivent choisir entre les
sultats de leurs observations, et la probabilité des erreurs
qu' ils ont encore à craindre. Enfin, elle mérite l' attention
des philosophes, en faisant voir comment la régularité finit par
s' établir dans les choses mêmes qui nous paraissent entièrement
livrées au hasard, et en dévoilant les causes cachées, mais
constantes, dont cette régularité dépend. C' est sur la
régularité des résultats moyens des événemens considérés en grand
nombre, que reposent divers établissemens, tels que les rentes
viagères, les tontines, les assurances, etc. Les questions qui
leur sont relatives, ainsi qu' à l' inoculation de la vaccine, et
aux décisions des assemblées, n' offrent aucune difficulté d'
après ma théorie. Je me borne ici à résoudre les plusrales ;
mais l' importance de ces objets dans la vie civile, les
considérations morales dont ils se compliquent, et les
observations nombreuses qu' ils supposent, exigent un ouvrage à
part.
p3
Si l' on considère les méthodes analytiques auxquelles la théorie
des probabilités a déjà donnaissance, et celles qu' elle peut
faire naître encore ; la justesse des principes qui lui servent
de base, la logique rigoureuse et délicate qu' exige leur emploi
dans la solution des problèmes ; les établissements d' utilité
publique qui s' appuient sur elle : si l' on observe ensuite que
dans les choses même qui ne peuvent être soumises au calcul,
cette théorie donne les aperçus les plus sûrs qui puissent nous
guider dans nos jugemens, et qu' elle apprend à se garantir des
illusions qui souvent nous égarent ; on verra qu' il n' est point
de science plus digne de nos méditations, et dont les résultats
soient plus utiles. Elle doit la naissance à deux géomètres
français du dix-septième siècle, si fécond en grands hommes et en
grandes découvertes, et peut-être de tous les siècles celui qui
fait le plus d' honneur à l' esprit humain. Pascal et Fermat se
proposèrent et résolurent quelques problèmes sur les probabilités
. Huyghens réunit ces solutions, et les étendit dans un petit
traité sur cette matière, qui ensuite a été considérée d' une
manière plus générale par les Bernoulli, Montmort, Moivre, et
par plusieurs géomètres célèbres de ces derniers tems.
p4
ads:
Calcul des fonctions génératrices. des fonctions génératrices.
1 concevons une suite de termes disposés sur une ligne
horizontale, et tels que chacun d' eux dérive des précédens,
suivant une loi donnée : supposons cette loi exprimée par une
équation entre plusieurs termes consécutifs, et leur indice, ou
le nombre qui indique le rang qu' ils occupent dans la série :
cette équation est ce que je nomme équation aux différences
finies à un seul indice variable . L' ordre ou le degré de cette
équation, est la différence du rang de ses deux termes extrêmes.
On peut, à son moyen, déterminer successivement les termes de la
rie, et la continuer indéfiniment ; mais il faut pour cela,
connaître un nombre de termes de la série, égal au degré de l'
équation. Ces termes sont les constantes arbitraires de l'
expression du terme général de la série, ou de l' intégrale de l'
équation aux différences. Concevons maintenant, au-dessus des
termes de larie précédente, une seconde série de termes
disposés horizontalement ; concevons encore, au-dessus des termes
de la seconde série, une troisième rie horizontale, et ainsi de
suite à l' infini, et supposons les termes de toutes ces séries,
liés par une équation générale entre plusieurs termes consécutifs
, pris tant dans le sens horizontal, que dans le sens vertical,
et les nombres qui indiquent leur
p5
rang dans les deux sens. Cette équation est ce que je nomme
équation aux différences finies partielles à deux indices
variables . Concevons pareillement au-dessus du plan qui
renferme les séries précédentes, un second plan renfermant des
séries semblables, dont les termes soient plas respectivement
au-dessus de ceux que contient le premier plan. Concevons ensuite
au-dessus de ce second plan, un troisième plan renfermant des
séries semblables, et ainsi à l' infini. Supposons tous les
termes de ces séries, liés par une équation entre plusieurs
termes consécutifs, pris tant dans le sens de la longueur, que
dans les sens de la largeur et de la profondeur, et les trois
nombres qui indiquent leur rang dans ces trois sens. Cette
équation est ce que je nomme équation aux différences finies
partielles à trois indices variables . Enfin, en considérant
la chose d' une manière abstraite et indépendante des dimensions
de l' espace, concevonsnéralement un système de grandeurs qui
soient fonctions d' un nombre quelconque d' indices variables, et
supposons entre ces grandeurs, leurs différences relatives à ces
indices et les indices eux-mêmes, autant d' équations qu' il y a
de ces grandeurs ; ces équations seront aux différences finies
partielles à un nombre quelconque d' indices variables. On peut à
leur moyen, terminer successivement ces grandeurs. Mais de même
que l' équation à un seul indice, exige que l' on connaisse un
certain nombre de termes de larie ; de même l' équation à deux
indices exige que l' on connaisse une ou plusieurs lignes de
séries, dont les termes généraux peuvent chacun être exprimés par
une fonction arbitraire d' un des indices. Pareillement, l'
équation à trois indices exige que l' on connaisse un ou
plusieurs plans de séries, dont les termesnéraux peuvent être
exprimés chacun par une fonction arbitraire de deux indices, et
ainsi de suite. Dans tous ces cas, on pourra, par des
éliminations successives, déterminer un terme quelconque des
séries. Mais toutes les équations entre lesquelles on élimine,
étant comprises dans un même système d' équations générales ;
toutes les expressions des termes successifs que l' on obtient
par ces éliminations, doivent être comprises dans une expression
générale, fonction des indices qui déterminent le rang du terme.
Cette expression est l' intégrale de
p6
l' équation proposée aux différences, et sa recherche est l'
objet du calcul intégral. Si l' on conçoit les indices des séries
que nous venons de considérer, comme infinis ; et qu' en divisant
chacun d' eux par un nombre infini, mais constant, on représente
ces divers quotiens par autant de variables ; si l' on regarde
ensuite, comme différence infiniment petite d' une quelconque de
ces variables, l' unité divisée par le nombre infini constant qui
lui correspond ; enfin, si l' on néglige les puissances
supérieures de ces infiniment petits, relativement aux
inférieures, et les infiniment petits eux-mêmes, eu égard aux
quantis finies ; les équations aux différences finies seront
transfores dans des équations aux différences infiniment
petites, dont les intégrales seront celles des équations aux
différences finies, dans lesquelles on aura substitué, au lieu
des indices, les variables correspondantes, en négligeant
pareillement les infiniment petits, relativement aux quantités
finies. Les quantités qu' on glige dans ce passage du fini à l'
infiniment petit, semblent ôter au calcul infinitésimal, la
rigueur des résultats géométriques ; mais il suffit, pour la lui
rendre, d' envisager les quantités que l' on conserve dans le
veloppement des équations aux différences finies et de leurs
intégrales, par rapport aux puissances des différences
indéterminées, comme ayant toutes pour facteurs leurs plus
petites puissances, dont on compare entre eux les coefficiens.
Cette comparaison étant rigoureuse, le calcul différentiel qui n'
est évidemment que cette comparaison même, a toute la rigueur des
autres opérations algébriques. Mais la considération des
infiniment petits de différens ordres que l' on reconnaît souvent
avec facilité par l' inspection seule des grandeurs, et l'
omission des infiniment petits d' un ordre supérieur à celui que
l' on conserve, à mesure qu' ils se présentent, simplifient
extrêmement les calculs, et sont l' un des principaux avantages
de l' analyse infinitésimale, qui d' ailleurs, en réalisant les
infiniment petits, donne par une première approximation, les
différences et les sommes des quantités. Le passage du fini à l'
infiniment petit, a l' avantage d' éclairer plusieurs points de
l' analyse infinitésimale, qui ont été l' objet de grandes
contestations parmi les géomètres. C' est ainsi que j' ai fait
voir dans les mémoires de l' académie des sciences, pour l' année
1779, et
p7
que je démontrerai ci-après, la possibilité d' introduire des
fonctions arbitraires discontinues dans les intégrales des
équations aux différences partielles, pourvu que ces fonctions
soient assujéties à des conditions détermies. Les résultats
transcendans de l' analyse sont, comme toutes les abstractions de
l' entendement, des signes généraux, dont on ne peut connaître la
véritable étendue, qu' en remontant par l' analyse mathématique,
aux idées élémentaires qui y ont conduit, ce qui présente souvent
de grandes difficultés ; car l' esprit humain en éprouve moins
encore à se porter en avant, qu' à se replier sur lui-même. Il
paraît que Fermat, le véritable inventeur du calcul différentiel
, a considéré ce calcul comme une dérivation de celui des
différences finies, en négligeant les infiniment petits d' un
ordre supérieur, par rapport à ceux d' un ordre inférieur : c'
est du moins ce qu' il a fait dans sa méthode de maximis , et
dans celle des tangentes, qu' il a étendue aux courbes
transcendantes. On voit même par sa belle solution du problème de
la réfraction de la lumière, en supposant qu' elle parvient d' un
point à un autre dans le tems le plus court, et en concevant qu'
elle se meut dans les divers milieux diaphanes, avec différentes
vîtesses ; on voit, dis-je, qu' il savait étendre son calcul, aux
fonctions irrationnelles, en se débarrassant des irrationalités,
par l' élévation des radicaux aux puissances. Newton a depuis
rendu ce calcul plus analytique, dans sa méthode des fluxions, et
il en a simplifié et généralisé les procédés, par l' invention de
son théorème du binome. Enfin, presqu' en même tems, Léibnitz a
enrichi le calcul différentiel d' une notation très-heureuse, et
qui s' est adaptée d' elle-même à l' extension que le calcul
différentiel a reçue par la considération des différentielles
partielles. La langue de l' analyse, la plus parfaite de toutes
les langues, étant par elle-même un puissant instrument de
couvertes ; ses notations, lorsqu' elles sont nécessaires et
heureusement imaginées, sont les germes de nouveaux calculs.
Ainsi la simple idée qu' eut Descartes, d' indiquer les
puissances représentées par des lettres, en écrivant vers le haut
de ces lettres, les nombres qui expriment le degré de ces
puissances, a don naissance au calcul exponentiel ; et
Léibnitz a été conduit par sa notation, à l' analogie singulière
des puissances et des différences. Le calcul des fonctions
génératrices, qui donne la véritable origine
p8
de cette analogie, offre tant d' exemples de ce transport des
exposans des puissances aux caractéristiques, qu' il peut encore
être considéré comme le calcul exponentiel des caractéristiques.
Le calcul des différences finies et des sommes des fonctions
rationnelles et entières d' une variable, a précédé le calcul
différentiel ; mais la considération des équations aux
différences finies, a suivi celle des équations aux différences
infiniment petites. à la véri, les termesnéraux des
progressions arithmétiques et géométriques, que l' on connaissait
depuis long-tems, ne sont au fond que les intégrales d' équations
aux différences finies, dones par l' égalité des rapports
arithmétiques etométriques à des constantes ; mais on ne les
avait pas envisagés sous ce point de vue, l' un de ceux qui, se
rattachant à des théoriesnérales, ont plusieurs fois conduit à
ces théories, et sont par là de véritablescouvertes. Taylor
et Moivre sont, si je ne me trompe, les premiers qui aient
considéré les équations aux différences finies. Moivre a intég
généralement les équations linéaires aux différences finies à
coefficiens constans, et qu' il a désignées sous le nom d'
échelles des suites récurrentes . Sa théorie est une des choses
les plus curieuses et les plus utiles que l' on ait trouvées sur
les suites. J' ai considéré depuis, les équations linéaires aux
différences finies partielles ; plusieurs géomètres se sont
ensuite occupés du même objet. L' intégration de ces équations,
comme tout ce qui concerne les séries, découle avec une extrême
facilité de la théorie des fonctions génératrices.
p58
15 la valeur de (..) donnée par la formule ( (..) ) du numéro
précédent, dépendant de la connaissance de (..) ; il est visible
que ces quantités seront connues, lorsque l' on aura le
coefficient de (..) dans le développement de (..) ; tout se réduit
donc à déterminer ce coefficient. On a par le N 5, (..) .
p59
Si l' on fait (..) , et que l' on différentie l' expression
précédente de (..) , N fois de suite par rapport à S, on aura
avec l' équation précédente, (..) équations, au moyen desquelles,
en éliminant les puissances indéterminées (..) , on parviendra à
une équation linéaire entre (..) , dont les coefficiens seront
fonctions de (..) , et de leurs différentielles prises par rapport
à S ; or il est clair que (..) doivent entrer de la même manière
dans ces coefficiens que l' on pourra ainsi obtenir en fonctions
rationnelles et entières des coefficiens de l' équation qui donne
les valeurs de (..) , et des différences de ces coefficiens, et par
conséquent en fonctions rationnelles de S. En faisant ensuite
disparaître les dénominateurs de ces fonctions, on aura une
équation linéaire entre (..) et ses différentielles, équation dont
les coefficiens seront des fonctions rationnelles et entières de
S. Cela posé, considérons un terme quelconque de cette équation,
tel que (..) , et nommons (..) le coefficient de (..) dans le
veloppement de (..) suivant les puissances de (..) ; ce
coefficient dans le développement de (..) sera (..) . En repassant
ainsi des fonctions génératrices à leurs coefficiens, l' équation
entre (..) et ses différences, donnera une équation entre (..) ,
dont les coefficiens seront des fonctions rationnelles de R, et
dont l' intégrale sera la valeur de (..) . Il suit de là que l'
intégration de toute équation linéaire aux différences finies
partielles, dont les coefficiens sont constans, dépend, 1 de l'
intégration d' une équation linéaire aux différences finies dont
les coefficiens sont variables ; 2 d' une intégrale définie
.
p60
L' intégrale définie dont pend la valeur de (..) dans la formule
( (..) ) est relative à R, et doit s' étendre jusqu' à (..) .
Relativement à l' équation aux différences partielles du premier
ordre (..) , on a (..) ; on a de plus (..) ; ce qui donne (..) ; d' où
l' on tire cette équation différentielle (..) ; ce qui donne l'
équation aux différences finies (..) ; on a ensuite (..) . La
formule ( (..) ) du numéro précédent deviendra donc (..) , l'
intégrale finie étant prise depuis (..) jusqu' à (..) . C' est l'
intégrale complète de l' équation précédente aux différences
partielles du premier ordre. L' équation aux différences en (..)
donne en l' intégrant, (..) , H étant une constante arbitraire ;
et le dénominateur étant l' unité, lorsque R est nul. Pour
terminer cette constante, on observera
p61
que le coefficient indépendant de (..) dans (..) est (..) ; c' est
la valeur de (..) , et par conséquent de H ; on aura donc (..) . En
passant du fini à l' infiniment petit, la méthode précédente
donnera l' intégrale des équations linéaires aux différences
infiniment petites partielles dont les coefficiens sont constans,
1 en intégrant une équation linéaire aux différences infiniment
petites ; 2 au moyen d' une intégrale définie. Mais ce n' est
pas ici le lieu de m' étendre sur cet objet que j' ai considéré
ailleurs avec étendue. On doit faire ici une remarque importante
relative au nombre des fonctions arbitraires que renferme l'
expressionnérale de (..) . Ce nombre, dans la formule ( (..) ) du
numéro précédent, est égal à N ; mais il devient plus petit dans
le cas où la valeur de Z du N 13 ne renfermant que des
puissances de (..) moindres que N, la plus haute puissance (..) a
un coefficient constant ou indépendant de (..) . Alors en suivant
l' analyse précédente, et déterminant à son moyen la valeur de
, comme nous avons déterminé celle de (..) ; en repassant ensuite
des fonctions génératrices à leurs coefficiens, on parviendra à
une formule analogue à la formule ( (..) ) ; seulement, l' intégrale
finie, au lieu de s' étendre jusqu' à (..) , devra s' étendre
jusqu' à (..) . Cette nouvelle expression de (..) , ne dépendra plus
que des (..) fonctions arbitraires (..) ; et tandis que la première
suppose la connaissance des N premiers rangs verticaux de la
table (Q) du N 14 ; celle-ci n' exige que la connaissance des
premiers rangs horizontaux de la même table. Ainsi les N
fonctions arbitraires (..) de la formule ( (..) ) n' équivalent qu' à
fonctions arbitraires distinctes. En effet, l' équation
proposée aux différences partielles, donne (..) au moyen des
valeurs de (..) , R étant un nombre entier. Elle donne
pareillement (..) au moyen de (..) , et éliminant (..) au moyen de
p62
son expression, on a (..) au moyen de (..) ; en continuant ainsi,
on voit que l' expression générale de (..) ne dépend que des
arbitraires (..) ; on peut donc, au moyen des (..) premiers rangs
horizontaux de la table (Q), former tous ses rangs verticaux qui
sont, chacun, des fonctions de (..) , dans lesquelles I est
invariable. En passant du fini à l' infiniment petit, on voit
avec évidence, que le nombre des fonctions arbitraires des
équations aux différentielles partielles, peut être moindre que
le plus haut degré de la différentielle dans ces équations.
p70
considérations sur le passage du fini à l' infiniment petit.
19 le passage du fini à l' infiniment petit, consiste à
gliger les différences infiniment petites, par rapport aux
quantis finies, et généralement les infiniment petits d' un
ordre supérieur, relativement à ceux d' un ordre inférieur. Cette
omission semble ôter à ce passage, la rigueur géométrique ; mais
pour se convaincre de son entière exactitude, il suffit de le
considérer comme le résultat de
p71
la comparaison des puissances homogènes d' une variable
indéterminée, dans le développement des termes d' une équation
qui subsiste, quelle que soit cette indéterminée ; car il est
clair que les termes affectés de la même puissance, doivent se
truire mutuellement. Pour rendre cela sensible par un exemple,
considérons l' équation suivante que donne l' équation (Q) du N
10, en y faisant (..) , (..) est la caractéristique des différences
finies, (..) variant de (..) , et D est la caractéristique des
différences, (..) variant de (..) . L' équation précédente
veloppée donne, en appliquant conforment à l' analyse du
numéro cité, les exposans des puissances de (..) à la
caractéristique D, (..) . Supposons qu' en développant la fonction
de (..) , représentée par (..) , on ait (..) . Développons pareillement
suivant les puissances de (..) , et supposons que l' on ait (..)
;
p72
l' expression précédente de (..) deviendra ainsi, (..) étant
indéterminé, les termes indépendans de (..) doivent être égalés
séparément entre eux ; on a donc (..) . Maintenant, (..) est le
coefficient de (..) dans le développement de (..) ; c' est ce que
l' on désigne dans le calcul différentiel, par (..) . Pareillement
est le coefficient de (..) dans le développement de (..) ; c'
est ce que l' on désigne par (..) , ou par (..) , et ainsi de suite ;
en substituant donc dans l' équation précédente, (..) au lieu de
, on aura le théorème suivant, (..) . Considéré comme résultat de
la comparaison des termes indépendans de (..) , ce théorème ne
laisse aucun doute sur son exactitude rigoureuse, et il est
visible par l' analyse précédente, que cette comparaison revient
à négliger les termes multipliés par (..) et ses puissances,
relativement aux quantités finies ; cette omission n' ôte donc
rien à la rigueur du calcul différentiel. Mais on voit de plus,
à priori, que les termes affectés de la même puissance de l'
indéterminée (..) , doivent se détruire mutuellement, ce que l' on
peut vérifier à posteriori ; ainsi ce que l' on néglige comme
infiniment petit est rigoureusement nul ; ensorte que l' omission
des infiniment petits, relativement aux quantités finies, n' est
au fond qu' un moyen facile d' éliminer les termes superflus qui
doivent disparaître dans le résultat final.
p73
Ce rapprochement du calcul aux différences finies, et du calcul
différentiel, met en évidence la rigueur des résultats de ce
dernier calcul, et donne sa vraie métaphysique ; mais ses
applications à l' étendue, à la durée et au mouvement, supposent
de plus, le principe des limites. On peut, par un rapprochement
semblable, éclaircir divers points de l' analyse infinitésimale,
qui ont été des sujets de contestation parmi les géomètres :
telle est la discontinuité des fonctions arbitraires dans les
intégrales des équations aux différences partielles. Ceux qui ont
rejeté cette discontinuité, se fondaient sur ce que l' analyse
ordinaire des différences infiniment petites, suppose que les
différentielles successives d' une fonction, doivent être
infiniment petites relativement aux précédentes, ce qui n' a
point lieu lorsque la fonction est discontinue. Pour éclaircir
cette question délicate, il faut la considérer dans les
différences finies, et observer ce qui arrive dans le passage de
ces différences aux différences infiniment petites. Prenons pour
exemple l' équation suivante aux difrences finies partielles
; son équation génératrice est, par le N 16, (..) ; et en
suivant l' analyse donnée précédemment, il est facile d' en
conclure que l' intégrale complète de l' équation proposée (A)
est (..) , (..) étant une fonction arbitraire de (..) étant une
fonction arbitraire de (..) . Il est facile d' ailleurs de s'
assurer que cette valeur satisfait à la proposée, et qu' elle en
est l' intégrale complète, puisqu' elle renferme deux fonctions
arbitraires. Supposons présentement que dans la table suivante,
p74
on connaisse les deux premiers rangs horizontaux compris entre
les deux colonnes verticales extrêmes (..) et que l' on connaisse
de plus tous les termes de ces deux colonnes ; on pourra
déterminer toutes les valeurs de (..) qui tombent entre ces
colonnes. Car si l' on veut former le troisième rang horizontal,
on observera que l' équation (A) donne (..) . En faisant dans
cette dernière équation, (..) , et successivement (..) , on aura les
valeurs de (..) , ou le troisième rang horizontal, au moyen des
deux premiers rangs horizontaux. On formera de la même manière,
le quatrième rang horizontal, et ainsi de suite à l' infini. Mais
si l' on veut déterminer les valeurs de (..) qui tombent hors de
la table (Z), les conditions précédentes ne suffisent pas, et il
faut leur en ajouter d' autres. Reprenons l' intégrale (..) ; et
supposons que le second rang horizontal qui détermine une des
deux fonctions arbitraires, soit tel que l' on ait (..) . Il est
facile de voir que cette équation satisfait à l' équation
proposée (A) ; mais elle n' en est qu' une intégrale
particulière qui répond au cas où le second rang horizontal se
forme du premier, au moyen de l' équation (..) . Tant que (..) sera
égal ou moindre que N, et que (..) sera positif ou nul ; on aura
la valeur de (..) au moyen du premier
p75
rang horizontal. Mais lorsque (..) croissant, (..) deviendra plus
grand que N, ou lorsque (..) deviendragatif ; il faudra
déterminer les valeurs de (..) , au moyen des deux colonnes
verticales extrêmes. Supposons que tous les termes de ces
colonnes soient nuls, et que l' on ait ainsi (..) . En faisant (..)
nul dans l' équation (..) , on aura (..) . En faisant ensuite (..)
dans la même équation, on aura (..) . Si l' on change ensuite dans
cette dernière équation (..) , on aura (..) . On pourra ainsi, au
moyen de ces deux équations, continuer les valeurs de (..) à l'
infini, du té des valeurs positives de X, et l' on en conclura
celles qui répondent à X négatif, au moyen de l' équation (..) .
De là résulte la construction suivante. Représentons les valeurs
de (..) depuis (..) jusqu' à (..) , par les ordonnées menées aux
angles d' un polygone dont l' abscisse soit X, et dont les deux
extrémités, que je désigne par Aetb, aboutissent aux points où
. On portera ce polygone depuis (..) , en lui donnant une position
contraire à celle qu' il avait depuis (..) ; c' est-à-dire, une
position telle, que les parties qui étaient au dessus de l' axe
des abscisses X, se trouvent au-dessous, le point B restant d'
ailleurs dans cette seconde position, à la
p76
me place que dans la première, et le point A répondant ainsi à
l' abscisse (..) . On placera ensuite ce même polygone, depuis (..)
jusqu' à (..) , en lui donnant une position contraire à la seconde,
et par conséquent semblable à la première, de manière que le
point A, dans cette troisième position, conserve la place qu' il
avait dans la seconde, et qu' ainsi le point B réponde à l'
abscisse (..) . En continuant de placer ainsi ce polygone
alternativement au-dessus et au-dessous de l' axe des abscisses ;
les ordonnées menées aux angles de cette suite de polygones,
seront les valeurs de (..) qui répondent à X positif.
Pareillement, on placera ce polygone depuis (..) jusqu' à (..) , en
lui donnant une position contraire à celle qu' il avait depuis
jusqu' à (..) , A restant d' ailleurs à la même place dans ces
deux positions. On placera ensuite ce polygone depuis (..) jusqu'
à (..) , en lui donnant une position contraire à la seconde, le
point B conservant la même place, et ainsi de suite à l' infini.
Les ordonnées de ces polygones représentent les valeurs de (..) ,
qui répondent à X négatif. On aura ensuite la valeur de (..) en
prenant la demi-somme des deux ordonnées qui répondent aux
abscisses (..) . Cette construction géométrique est générale,
quelle que soit la nature du polygone que nous venons de
considérer. Elle servira à déterminer toutes les valeurs de (..) ,
comprises depuis (..) , pourvu que l' on ait (..) , et que d'
ailleurs le second rang horizontal de la table (Z) soit tel, que
l' on ait (..) . On a par ce qui précède (..) ; il suit de là que
dans la table (Z), le (..) rang horizontal, est
p77
le (..) rang pris avec un signe contraire et dans un ordre
renversé ; ensorte que le terme (..) est le même que le terme (..)
rang pris avec un signe contraire. On a ensuite (..) . Considérons
présentement les vibrations d' une corde tendue, dont la figure
initiale soit quelconque, pourvu qu' elle soit très-rapprochée
dans tous ses points, de l' axe des abscisses. Nommons X l'
abscisse, T le tems, (..) l' ordonnée d' un point quelconque de
la corde, après le tems T. Concevons de plus l' abscisse X
partagée dans une infinité de parties égales à Dx, et que nous
prendrons pour unité ; ce qui revient à considérer X comme un
nombre infini. Cela posé, on aura par les principes de dynamique,
; A étant un coefficient constant dépendant de la tension et
de la grosseur de la corde. Si l' on fait (..) deviendra une
fonction de (..) , que nous désignons par (..) ; or la grandeur de
Dt étant arbitraire, on peut la supposer telle, que la variation
de (..) soit égale à celle de X, que nous avons prise pour l'
unité ; l' équation précédente devient ainsi (..) étant ici des
nombres infinis. Cette équation est la même que celle que nous
venons de considérer ; ainsi la construction géométrique que nous
avons donnée précédemment, peut être
p78
employée dans ce cas : le polygone dont les ordonnées des angles
sont représentées par (..) , est ici la figure initiale de la corde
; mais il faut pour cela supposer la longueur N, divisée dans
une infinité de parties égales à Dx. Il faut de plus que la
corde soit fixe à ses extrémités, afin que l' on ait (..) . D'
ailleurs l' équation de condition (..) . Or (..) est la vitesse
initiale de la corde ; cette vitesse doit donc être nulle à l'
origine du mouvement. Toutes les fois que ces conditions auront
lieu, la construction précédente donnera toujours le mouvement de
la corde, quelle que soit sa figure initiale, pourvu cependant
que dans tous ses points, (..) soit un infiniment petit du second
ordre, c' est-à-dire que deux élémens contigus de la corde, ne
forment point un angle fini. Cette condition est nécessaire pour
que l' équation différentielle du problème puisse subsister, et
pour que celle-ci (..) . Mais d' ailleurs il est évident, par ce
qui préde, que la figure initiale de la corde peut être
discontinue et formée d' un nombre quelconque d' arcs de courbes
différentes, pourvu que ces arcs se touchent. Les diverses
situations de la corde dans son mouvement, sont représentées par
les rangs horizontaux de la table (Z) ; et comme
p79
les rangs qui correspondent aux valeurs de (..) sont les mêmes par
ce qui préde, il en résulte que la corde revient à la même
situation après les tems (..) . On voit encore par la construction
géométrique donnée ci-dessus, que si l' on conçoit une suite de
cordes liées entre elles, et placées alternativement au-dessus et
au-dessous de l' axe des abscisses, comme dans cette construction
; toutes ces cordes vibreront de la même manière, ensorte que
leurs figures initiales étant les mêmes, leurs figures seront
constamment pareilles. On peut même ne fixer que les deux
extrémités de cette suite, et laisser leurs noeuds entièrement
libres ; car les élémens des deux cordes au point de leur
jonction, étant en ligne droite et également tendus, ce point n'
a aucune tendance à se mouvoir, et doit conséquemment rester
immobile ; ce que l' expérience confirme. Cette analyse des
cordes vibrantes, établit d' une manière incontestable, la
possibilité d' admettre des fonctions discontinues dans ce
problème ; et l' on en doit généralement conclure que ces
fonctions peuvent être employées dans tous les problèmes qui
dépendent d' équations à différences partielles infiniment
petites, pourvu qu' elles puissent subsister avec ces équations
et avec les conditions du problème. On peut en effet considérer
ces équations, comme des cas particuliers d' équations aux
différences finies, dans lesquelles on suppose que les variables
deviennent infinies ; or rien n' étant négligé dans la théorie
des équations aux différences finies partielles, il est visible
que les fonctions arbitraires de leurs intégrales, ne sont point
assujéties à la loi de continuité, et que les constructions de
ces équations, au moyen de polygones, ont lieu quelle que soit la
nature de ces polygones. Maintenant lorsqu' on passe du fini à l'
infiniment petit, ces polygones se changent dans des courbes qui,
par conséquent, peuvent être discontinues ; ainsi la loi de
continuité n' est nécessaire ni dans les fonctions arbitraires
des intégrales, ni dans les constructions géométriques qui les
représentent. Il faut seulement observer que si l' équation aux
différentielles partielles en (..) , est de l' ordre N, il ne doit
point y avoir de saut entre deux valeurs consécutives de ( (..) ),
p80
Rets étant des nombres entiers positifs, S pouvant être nul ;
c' est-à-dire que la différentielle de cette quantité doit être
infiniment petite par rapport à cette quantité elle-même. Cette
condition est indispensable pour que l' équation différentielle
proposée puisse subsister ; parce que toute équation
différentielle partielle suppose que les différentielles
partielles de (..) dont elle est formée, et divisées par les
puissances respectives de (..) , sont des quantités finies et
comparables entre elles ; mais rien n' oblige d' admettre la même
condition relativement aux différences de (..) de l' ordre N ou
d' un ordre supérieur. En prenant pour fonctions arbitraires, les
différences les plus élevées des fonctions arbitraires qui
entrent dans l' intégrale d' une équation aux différences
partielles ; cette intégrale ne renfermera plus alors que des
fonctions arbitraires et leurs intégrales successives qui sont
continues, parce qu' ennéral l' intégrale (..) est continue
dans le cas même la fonction (..) ne l' est pas. La condition
précédente se duit donc à ce que la différence (..) de chaque
fonction arbitraire soit continue, c' est-à-dire que sa
différentielle soit infiniment plus petite. Il ne doit donc point
y avoir de saut entre deux tangentes consécutives de la courbe
qui représente la fonction arbitraire de l' intégrale d' une
équation aux différentielles partielles du second ordre ; ainsi
dans le problème des cordes vibrantes que nous venons de discuter
, il est nécessaire et il suffit que deux élémens quelconques
contigus de la figure initiale de la corde, forment entre eux un
angle infiniment peu différent de deux angles droits. Il ne doit
point y avoir de saut entre deux rayons osculateurs consécutifs
de la courbe qui représente la fonction arbitraire continue dans
l' intégrale, si l' équation aux différences partielles est du
troisième ordre ; et ainsi de suite.
p86
Ainsi la même analyse qui donne les fonctionsnératrices des
dérivées successives des variables, donne les fonctions sous le
signe (..) , des intégrales définies qui expriment cesrivées. La
caractéristique (..) n' exprime, à proprement parler, qu' un
nombre I d' opérations consécutives ; la considération des
fonctions génératrices réduit ces opérations à des élévations d'
un polynome à ses diverses puissances ; et la considération des
intégrales définies donne directement l' expression de (..) , dans
le cas me où l' on supposerait I un nombre fractionnaire. Mais
le grand avantage de cette transformation des expressions
analytiques, en intégrales définies, est de fournir une
approximation aussi commode que convergente, de ces expressions,
lorsqu' elles sont formées d' un grand nombre de termes et de
facteurs ; c' est ce qui a lieu dans la théorie des probabilités,
quand le nombre des événemens que l' on considère est très-grand.
Alors le calcul numérique des résultats auxquels on est conduit
par la solution des problèmes, devient impraticable, et il est
indispensable d' avoir pour ce calcul, une méthode d'
approximation d' autant plus convergente, que ces résultats sont
plus compliqués. Leur expression en intégrales définies, procure
cet avantage, et celui de donner les lois suivant lesquelles la
probabilité des résultats indiqués par les événemens, approche de
la certitude à mesure que les événemens se multiplient, lois dont
la connaissance est l' un des objets les plus intéressans de la
théorie des probabilités. Ce fut à l' occasion d' un problème de
ce genre, dont la solution dépendait de l' expression du terme
moyen du binome élevé à une grande puissance, que Stirling
transforma cette expression dans une série très-convergente : son
sultat peut être regardé comme une des choses les plus
ingénieuses que l' on ait trouvées sur les suites. Il est surtout
remarquable, en ce que dans une recherche qui semble n' admettre
que des quantités algébriques, il introduit une quantité
transcendante, savoir, la racine carrée du rapport de la
circonférence au diamètre. Mais la méthode de Stirling, fondée
sur un théorème de Wallis, et sur l' interpolation des suites,
laissait à désirer une thode directe qui s' étendît à toutes
les fonctions composées d' un grand nombre de termes
p87
et de facteurs. Telle est la méthode dont je viens de parler, et
que j' ai donnée d' abord dans les mémoires de l' académie des
sciences pour l' année 1778, et ensuite avec plus d' étendue,
dans lesmoires de la même académie, pour l' année 1782. Le
développement de cette méthode va être l' objet de la seconde
partie de ce livre, et complettera ainsi le calcul des fonctions
génératrices. Les séries auxquelles cette méthode conduit,
renferment le plus souvent, la racine carrée du rapport de la
circonférence au diamètre ; et c' est la raison pour laquelle
Stirling l' a rencontrée dans le cas particulier qu' il a
considéré ; mais quelquefois elles dépendent d' autres
transcendantes dont le nombre est infini. Les limites des
intégrales définies que cette thode réduit en ries
convergentes, sont, comme on vient de le voir, données par les
racines d' une équation que l' on peut nommer équation des
limites . Mais une remarque très-importante dans cette analyse,
et qui permet de l' étendre aux fonctions que la théorie des
probabilités présente le plus souvent, est que les séries
auxquelles on parvient, ont également lieu dans le casme où,
par des changemens de signe dans les coefficiens de l' équation
des limites, ses racines deviennent imaginaires. Ces passages du
positif au négatif, et du réel à l' imaginaire, dont les
premières applications ont paru, si je ne me trompe, dans les
moires cités, m' ont conduit dans ces mémoires, aux valeurs de
plusieurs intégrales définies, qui offrent cela de remarquable,
savoir, qu' elles dépendent à-la-fois de ces deux transcendantes,
le rapport de la circonférence au diamètre, et le nombre dont le
logarithme hyperbolique est l' unité. On peut donc considérer ces
passages, comme des moyens de découvertes, pareils à l' induction
dont les géomètres font depuis long-tems usage. Mais ces moyens,
quoique employés avec beaucoup de précautions et de réserve,
laissent toujours à desirer des démonstrations de leurs résultats
. Leur rapprochement des méthodes directes, servant à les
confirmer et à faire voir la grande généralité de l' analyse, et
pouvant par cette raison, intéresser les géomètres ; j' ai
insisté particulièrement sur ces passages qu' Euler considérait
en même tems que moi, et dont il a fait plusieurs applications
curieuses, mais qui n' ont paru que depuis la publication des
moires cités.
p120
31 la principale difficulté que présente l' application de la
thode précédente, consiste dans l' intégration des équations
différentielles linéaires qui déterminent (..) . Les degrés de ces
équations nependent point de ceux des équations aux
différences en (..) ; ils dépendent uniquement des puissances les
plus élevées de S, dans leurs coefficiens. En ne considérant
donc qu' une seule variable (..) , l' équation différentielle en
sera d' un degré égal au plus haut exposant de S, dans les
coefficiens de l' équation aux différences en (..) . L' équation
différentielle en (..) ne sera ainsi résoluble généralement que
dans le cas où ce plus haut exposant est l' unité. Développons ce
cas fort étendu. Représentons l' équation différentielle en (..)
par la suivante, (..) étant des fonctions linéaires de la variable
principale (..) et de ses différences, soit finies, soit
infiniment petites. Si l' on fait (..) ; Metn étant des fonctions
de X ; on aura donc, en intégrant
p121
par parties comme dans le nuro précédent, les deux équations
suivantes, (..) , H étant une constante arbitraire. Supposons C
nul dans la seconde équation ; (..) sera l' une des limites de l'
intégrale (..) , suivant que l' on prend (..) . On déterminera les
autres limites, en résolvant l' équation (..) . Appliquons à cette
intégrale, la méthode d' approximation du N 23. Si l' on désigne
par A, la valeur de X, donnée par l' équation (..) , ce que
devient la fonction (..) , lorsqu' on y change Xena ; on fera (..)
; si l' on suppose S très-grand, et si l' on fait (..) sera un
très-petit coefficient. La quantité sous le radical prendra cette
forme (..) . X, X étant une fonction de (..) ; on aura donc, par
le retour des suites, la valeur de Xent, par une série de cette
forme, (..) . Maintenant, (..) , si l' on substitue dans cette
intégrale, au lieu de (..) , on substitue pour X, sa valeur
précédente
p122
en T, on aura (..) par une suite de cette forme, (..) , les limites
de l' intégrale relative à T devant seterminer par la
condition qu' à ces limites, la quantité (..) , ou son équivalente
, soit nulle ; d' il suit que ces limites sont (..) ; on aura
donc par le N 24, (..) . Cette expression a l' avantage d' être
indépendante de la détermination des limites en X, qui rendent
nulle la fonction (..) ; ensorte qu' elle subsiste dans le cas
me où cette fonction, égalée à zéro, n' a point de racines
réelles ; elle subsiste encore dans le cas de S négatif. Cette
remarque analogue à celle que nous avons faite dans le N 25, et
qui tient, comme elle, à la généralité de l' analyse, est très-
remarquable en ce qu' elle donne le moyen d' étendre la formule
précédente, à un grand nombre de cas auxquels la méthode qui nous
y a conduits, semble d' abord se refuser. Cette formule ne
renferme que la constante arbitraire H, et par conséquent, elle
n' est qu' une intégrale particulière de l' équation
différentielle propoe en (..) , si cette équation est d' un ordre
supérieur à l' unité. Pour avoir dans ce cas, l' intégrale
complète, il faudra chercher dans l' équation (..) , autant de
valeurs différentes de X, qu' il y a d' unités dans cet ordre.
Soient (..) ces valeurs ; on changera successivement dans l'
expression précédente de (..) ; on aura autant de valeurs
particulières qui renferment chacune une arbitraire, et dont la
somme sera l' expression complète de (..) . Quand les coefficiens
de la proposée en (..) renferment des puissances de S supérieures
à l' unité ; on peut quelquefois décomposer cette équation en
plusieurs autres qui ne renferment que cette première puissance.
Si l' on a, par exemple, l' équation (..) ,
p123
M étant une fonction rationnelle et entière de S ; on mettra
cette fonction sous la forme (..) . Il est facile, par ce qui
précède, de déterminer (..) en intégrales définies, et de réduire
ces intégrales en séries convergentes, lorsque S est un grand
nombre. On aura ensuite (..) . Dans plusieurs cas l' équation
différentielle en (..) étant d' un ordre supérieur au premier, ne
peut être intégrée rigoureusement, on peut déterminer (..) par une
approximation très-convergente ; en substituant ensuite cette
valeur de (..) dans l' intégrale (..) , on peut obtenir d' une
manière fort approchée la valeur de cette intégrale. 32 l'
analyse exposée dans les numéros précédens, s' étend encore aux
équations à différences partielles, finies et infiniment petites.
Pour cela, considérons d' abord l' équation linéaire aux
différentielles partielles dont les coefficiens sont constans. En
désignant par (..) la variable principale, (..) étant les deux
variables dont elle est fonction ; et représentant cette équation
par celle-ci, (..) étant une fonction linéaire de (..) et de ses
différences partielles ; on y supposera (..) , (..) étant une
fonction de X ; alors l' équation (..) prend cette forme (..) , M
étant une fonction de X et de (..) . En égalant donc
p124
M à zéro, on aura la valeur de (..) , et cette valeur substituée
dans l' intégrale (..) , donnera l' expression générale de (..) ,
dans laquelle (..) est une fonction arbitraire de X ; les limites
de l' intégrale étant indépendantes de X, mais d' ailleurs
arbitraires. Si l' équation proposée (..) , est de l' ordre N, il
faudra, au moyen de l' équation (..) , déterminer un nombre N de
valeurs de (..) . La somme des N valeurs de (..) qui en résulteront
, et dans lesquelles on pourra mettre pour (..) des fonctions
arbitraires différentes de X, sera l' expression complète de (..)
. Il résulte de ce que nous avons dit dans la première partie de
ce livre, que l' équation (..) est l' équation génératrice de l'
équation proposée (..) . Considérons présentement l' équation aux
différences partielles (..) , dans laquelle V, T, Etr sont des
fonctions quelconques linéaires de (..) et de ses différences
partielles, soit finies, soit infiniment petites. Si l' on y
suppose, comme ci-dessus, (..) étant une fonction de X qu' il s'
agit de déterminer. On aura une équation de cette forme (..) ; par
conséquent, si l' on désigne (..) , et si l' on suppose que l' on a
substitué dans Metn pour (..) sa valeur en X,
p125
on aura (..) . Cette équation intégrée par parties, comme dans les
numéros précédens, donne les deux suivantes, (..) . La première
détermine (..) , et la seconde donne les limites de l' intégrale
. Cette valeur de (..) ne renfermant point de fonction arbitraire
, elle n' est qu' une intégrale particulière de l' équation
proposée aux différences partielles. Pour la rendre complète, on
observera que l' intégrale de l' équation (..) , qui détermine (..) ,
Q étant une fonction de X, et d' une constante arbitraire que
nous désignerons par U ; en représentant donc par (..) , une
fonction arbitraire de U, l' équation proposée aux différences
partielles sera satisfaite par cette valeur de (..) ; l' intégrale
relative à X étant prise entre les limites déterminées par l'
équation (..) , et l' intégrale relative à U étant prise entre des
limites quelconques. Cette valeur de (..) sera donc l' intégrale
complète de l' équation proposée aux différences partielles, si
celle-ci est du premier ordre ; mais si elle est d' un ordre
supérieur, il faudra, au moyen de l' équation (..) , déterminer
autant de valeurs de Xenu, qu' il y a d' unités dans cet ordre.
La réunion des valeurs de (..) auxquelles on parviendra, sera l'
expression complète de (..) .
p174
remarque générale sur la convergence des séries. 44 nous
terminerons cette introduction, par une observation importante
sur la convergence des séries dont nous avons fait un si fréquent
usage. Ces séries convergent très-rapidement dans leurs premiers
termes ; mais souvent cette convergence diminue et finit par se
changer en divergence. Elle ne doit pas empêcher l' usage de ces
ries, en n' employant que leurs premiers termes, dans lesquels
la convergence est rapide ; car le reste de la série, que l' on
néglige, est le développement d' une fonction algébrique ou
intégrale, très-petite par rapport à ce qui précède. Pour rendre
cela sensible par un exemple, considérons le développement en
rie, de l' intégrale (..) , prise depuis (..) jusqu' à T infini.
On a, par le N 27,
p175
. Cette série finit par être divergente, quelque grande que
soit la valeur que l' on suppose à T ; mais alors on peut
employer sans erreur sensible, ses premiers termes. En effet, si
l' on considère, par exemple, ses quatre premiers termes, le
reste de larie sera (..) ; or cette quantité, abstraction faite
du signe, est plus petite que le terme (..) qui précède ; c' est-à
-dire que l' on a (..) , T étant égal à (..) , et l' intégrale
devant être prise depuis Z nul jusqu' à Z infini. On a donc (..)
; or cette dernière quantité est moindre que (..) , lorsque (..)
surpasse 7 ; par conséquent si T est un grand nombre, on peut
employer sans crainte d' erreur sensible, les premiers termes de
la série pcédente qui exprime l' intégrale (..) . Ce que nous
venons de dire sur cette série, peut s' appliquer à toutes celles
que nous avons considérées, et doit ôter toute inquiétude sur les
usages que nous en avons faits.
p177
principes généraux de cette théorie. 1 tous les événemens,
ceux me qui par leur petitesse, semblent ne pas tenir aux
grandes lois de la nature, en sont une suite aussi nécessaire que
les révolutions célestes. Une intelligence qui pour un instant
donné, connaîtrait toutes les forces dont la matière est animée,
ainsi que la position et la vîtesse de chacune de ses molécules ;
si d' ailleurs elle était assez vaste pour soumettre ces données
à l' analyse, embrasserait dans la même formule, les mouvemens
les plus grands corps de l' univers et ceux du plus léger atome.
Pour une semblable intelligence, rien ne serait irrégulier, et la
courbe décrite par une simple molécule d' air ou de vapeurs,
paraîtrait réglée d' une manière aussi certaine, que l' est pour
nous l' orbe du soleil. Mais dans l' ignorance où nous sommes de
l' immensité des donnéescessaires à la solution de ce grand
problème, et dans l' impossibilité, vu notre faiblesse, d'
assujétir au calcul la plupart de celles qui nous sont connues,
alors même que leur nombre est très-borné ; nous attribuons les
phénones qui nous paraissent arriver et se succéder sans aucun
ordre, à des causes variables et cachées, dont l' action a été
désignée par le mot hasard , mot qui n' est au fond que l'
expression de notre ignorance. La probabilité est relative, en
partie, à cette ignorance, et en
p178
partie, à nos connaissances. Nous savons que sur trois ou un plus
grand nombre d' événemens, un seul doit exister ; mais rien ne
porte à croire que l' un d' eux arrivera plutôt que les autres.
Dans cet état d' indécision, il est impossible de prononcer avec
certitude sur leur existence. Il est cependant probable qu' un de
ces événemens, pris à volonté, n' existera pas ; parce que, sur
divers cas pour nous également possibles, nous en voyons
plusieurs qui excluent son existence, tandis qu' un seul la
favorise. La théorie des probabilités consiste àduire tous les
événemens qui peuvent avoir lieu dans une circonstance donnée, à
un certain nombre de cas également possibles, c' est-à-dire tels
que nous soyons également indécis sur leur existence, et à
déterminer parmi ces cas, le nombre de ceux qui sont favorables à
l' événement dont on cherche la probabilité. Le rapport de ce
nombre à celui de tous les cas possibles, est la mesure de cette
probabilité qui n' est donc qu' une fraction dont le nurateur
est le nombre des cas favorables, et dont le dénominateur est
celui de tous les cas possibles.
p189
de la probabilité des événemens composés d' événemens simples
dont les possibilités respectives sont données. 3 si l' on
développe le produit ( (..) ) compode N facteurs ; ce
développement renfermera toutes les combinaisons possibles des N
lettres (..) , prises une à une, deux à deux, trois à trois, etc.
Jusqu' à N ; et chaque combinaison aura pour coefficient l'
unité. Ainsi la combinaison (..) résultant du produit ( (..) ),
multiplié par le terme 1 du développement des autres facteurs ;
son coefficient est évidemment l' unité. Maintenant, pour avoir
le nombre total des combinaisons de N lettres prises Xàx ; on
observera que chacune de ces combinaisons devient (..) , lorsqu' on
suppose (..) égaux à P. Alors le produit des N facteurs
précédens se change dans le binome ( (..) ) ; or le coefficient de
dans le développement de ce binome, est (..) ; cette quantité
exprime donc le nombre des combinaisons des N lettres prises
Xàx. On aura le nombre total des combinaisons de ces lettres,
prises une à une, deux à deux, etc. Jusqu' à Nàn, en faisant (..)
, dans le binome ( (..) ), et en retranchant l' unité ; ce qui donne
pour ce nombre. Supposons que dans chaque combinaison, on ait
égard non-seulement au nombre des lettres, mais encore à leur
situation ; on déterminera le nombre des combinaisons, en
observant que dans la combinaison de deux lettres, (..) , on peut
mettre (..) à la seconde
p190
place, et ensuite à la première ; ce qui donne les deux
combinaisons (..) . En introduisant ensuite une nouvelle lettre (..)
dans chacune de ces combinaisons, on peut la mettre à la première
, à la seconde ou à la troisième place ; ce qui donne (..)
combinaisons. En continuant ainsi, on voit que dans une
combinaison de X lettres, on peut leur donner (..) situations
différentes ; d' où il suit que le nombre total des combinaisons
de N lettres, prises Xàx, étant par ce qui précède, (..) ; le
nombre total des combinaisons, lorsqu' on a égard à la différente
situation des lettres, sera cette même fonction, en supprimant
son dénominateur. On peut facilement, au moyen de ces formules,
déterminer les bénéfices des loteries. Supposons que le nombre
des numéros d' une loterie, soit N, et qu' il en sorte R à
chaque tirage ; on veut avoir la probabilité qu' une combinaison
de S de ces numéros, sortira au premier tirage. Le nombre total
des combinaisons des numéros, pris Ràr, est par ce qui précède,
. Pour avoir parmi ces combinaisons, le nombre de celles dans
lesquelles les S numéros sont compris, on observera que si l' on
retranche ces numéros de la totalité des numéros, et que l' on
combine (..) , le reste (..) , le nombre de ces combinaisons sera le
nombre cherché ; car il est clair qu' en ajoutant les S numéros
à chacune de ces combinaisons, on aura les combinaisons Ràr des
numéros dans lesquelles sont ces S numéros. Ce nombre est donc
; en le divisant par le nombre total des combinaisons Ràr des
N numéros, on aura pour la probabilité cherchée, (..) .
p191
En divisant cette quantité par (..) , on aura par ce qui précède,
la probabilité que les S numéros sortiront dans un ordre
déterminé entre eux. On aura la probabilité que les S premiers
numéros du tirage, seront ceux de la combinaison proposée, en
observant que cette probabilité revient à celle d' amener cette
combinaison, en supposant qu' il ne sort que S numéros à chaque
tirage ; ce qui revient à faire (..) dans la fonction prédente
qui devient ainsi (..) . Enfin, on aura la probabilité que les S
numéros choisis sortiront les premiers dans un ordre déterminé,
en réduisant le numérateur de cette fraction, à l' unité. Les
quotiens des mises divisées par ces probabilités, sont ce que la
loterie doit rendre aux joueurs : l' excédant de ces quotiens sur
ce qu' elle donne, est son bénéfice. En effet, si l' on nomme P
la probabilité du joueur, M sa mise, et X ce que la loterie
doit lui rendre, pour l' égalité du jeu ; (..) sera la mise de la
loterie ; car ayant reçu la mise M, et rendant X au joueur ;
elle ne met au jeu que (..) . Or pour l' égalité du jeu, l'
espérance mathématique de chaque joueur doit être égale à sa
crainte : son espérance est le produit de la mise (..) de son
adversaire, par la probabilité P de l' obtenir : sa crainte est
le produit de sa mise M, par la probabilité (..) de la perte. On
a donc (..) ; c' est-à-dire que pour l' égalité du jeu, les mises
doivent être réciproques aux probabilités de gagner. Cette
équation donne (..) ; ainsi ce que la loterie doit rendre, est le
quotient de la mise divisée par la probabilité du joueur pour
gagner.
p210
Le problème que nous venons de résoudre, est celui que l' on
nomme problème des partis dans l' analyse des hasards. Le
chevalier De Méré le proposa à Pascal, avec quelques-autres
problèmes sur le jeu des dés. Deux joueurs dont les adresses sont
égales, ont mis au jeu la même somme ; ils doivent jouer jusqu' à
ce que l' un d' eux ait gagné un nombre de fois donné, son
adversaire ; mais ils conviennent de quitter le jeu, lorsqu' il
manque encore X points au premier joueur pour atteindre ce
nombre donné, et lorsqu' il manque (..) points au second joueur.
On demande de quelle manière ils doivent se partager la somme
mise au jeu. Tel est le problème que Pascal résolut au moyen de
son triangle arithmétique. Il le proposa à Fermat qui en donna
la solution par la voie des combinaisons ; ce qui occasionna
entre ces deux grands géomètres une discussion, à la suite de
laquelle Pascal reconnut la bonté de la méthode de Fermat, pour
un nombre quelconque de joueurs. Malheureusement nous n' avons
qu' une partie de leur correspondance, dans laquelle on voit les
premiers élémens de la théorie des probabilités, et leur
application à l' un des problèmes les plus curieux de cette
théorie.
p275
des lois de la probabilité, qui résultent de la
multiplication indéfinie des événemens. 16 à mesure que les
événemens se multiplient, leurs probabilités respectives se
veloppent de plus en plus : leurs résultats moyens et les
bénéfices ou les pertes qui en dépendent, convergent vers des
limites dont ils approchent avec des probabilités toujours
croissantes. La détermination de ces accroissemens et de ces
limites, est une des parties les plus intéressantes et les plus
licates de l' analyse des hasards. Considérons d' abord la
manière dont les possibilités de deux événemens simples dont un
seul doit arriver à chaque coup, se développent lorsqu' on
multiplie le nombre de coups. Il est visible que l' événement
dont la facilité est la plus grande, doit probablement arriver
plus souvent dans un nombre donné de coups ; et l' on est por
naturellement à penser qu' en répétant les coups un très-grand
nombre de fois, chacun de ces énemens arrivera
proportionnellement à sa facilité, que l' on pourra ainsi
couvrir par l' expérience. Nous allons démontrer analytiquement
cet important théorème.
p284
17 considérons une urne A renfermant un très-grand nombre N de
boules blanches et noires, et supposons qu' à chaque tirage, on
tire une boule de l' urne, et qu' on la remplace par une boule
noire. On demande la probabilité qu' après R tirages, le nombre
des boules blanches sera X. Nommons (..) cette probabilité. Après
un nouveau tirage, elle devient (..) . Mais pour qu' il y ait X
boules blanches après (..) tirages, il faut qu' il y ait ou (..)
boules blanches après le tirage R, et que le tirage suivant
fasse sortir une boule blanche, ou X boules blanches après le
tirage R, et que le tirage suivant fasse sortir une boule noire.
La probabilité qu' il y aura (..) boules blanches après R tirages
, est (..) , et la probabilité qu' alors le tirage suivant fera
sortir une boule blanche, est (..) ; la probabilité de l'
événement composé est donc (..) ; c' est la première partie de (..)
. La probabilité qu' il y aura X boules blanches après le tirage
R, est (..) ; et la probabilité qu' alors il sortira une boule
noire, est (..) , parce que le nombre des boules noires de l' urne
est (..) ; la probabilité de l' événement composé est donc (..) ;
c' est la seconde partie de (..) . Ainsi l' on a (..) . Si l' on fait
,
p285
cette équation devient (..) , N étant supposé un très-grand nombre
, on peut réduire en séries convergentes (..) ; on aura donc, en
gligeant les carrés et les puissances supérieures de (..) ; l'
intégrale de cette équation aux différences partielles est (..) ,
étant une fonction arbitraire de (..) , qu' il faut déterminer par
la valeur de (..) . Supposons que l' urne A ait é remplie de
cette manière. On projette un prisme droit dont la base étant un
polygone régulier de (..) côtés, est assez étroite pour que le
prisme ne retombe jamais sur elle. Sur les (..) faces latérales,
P sont blanches et Q sont noires, et l' on met dans l' urne A,
à chaque projection, une boule de la couleur de la face sur
laquelle le prisme retombe. Après N projections, le nombre des
boules blanches sera à fort peu près, par le N précédent, (..) et
la probabilité qu' il sera (..) , est, par le même numéro, (..) ;
p286
c' est la valeur de (..) ; mais la valeur précédente de (..) donne
. La valeur de X la plus probable est celle qui rend nul (..) ,
et par conséquent elle est égale à (..) ; la probabilité que la
valeur de X sera contenue dans les limites (..) , l' intégrale
étant prise depuis (..) . Cherchons maintenant la valeur moyenne du
nombre des boules blanches contenues dans l' urne A, après R
tirages. Cette valeur est la somme de tous les nombres possibles
de boules blanches, multipliés par leurs probabilités respectives
; elle est donc égale à (..) ,
p287
l' ingrale étant prise depuis (..) . Cette valeur est ainsi (..) ;
par conséquent, elle est la même que la valeur de X la plus
probable. Considérons maintenant deux urnes Aetb renfermant
chacune le nombre N de boules, et supposons que dans le nombre
total (..) des boules, il y en ait autant de blanches que de
noires. Concevons que l' on tire en même tems, une boule, de
chaque urne, et qu' ensuite on mette dans une urne, la boule
extraite de l' autre. Supposons que l' onpète cette opération,
un nombre quelconque R de fois, en agitant à chaque fois les
urnes, pour en bien mêler les boules ; et cherchons la
probabilité qu' après ce nombre R d' opérations, il y aura X
boules blanches dans l' urne A. Soit (..) cette probabilité. Le
nombre des combinaisons possibles dans R opérations, est (..) ;
car à chaque opération, les N boules de l' urne A peuvent se
combiner avec chacune des N boules de l' urne B, ce qui produit
combinaisons ; (..) est donc le nombre des combinaisons dans
lesquelles il peut y avoir X boules blanches dans l' urne A
après ces opérations. Maintenant, il peut arriver que l'
opération ( (..) ) fasse sortir une boule blanche de l' urne A, et
y fasse rentrer une boule blanche ; le nombre de cas dans
lesquels cela peut arriver, est le produit de (..) , par le nombre
X des boules blanches de l' urne A, et par le nombre (..) des
boules blanches qui doivent être alors dans l' urne B, puisque
le nombre total des boules blanches des deux urnes, est N. Dans
tous ces cas, il reste X boules blanches dans l' urne A ; le
produit X ( (..) ) est donc une des parties de (..) . Il peut arriver
encore que l' opération ( (..) ) fasse sortir et rentrer dans l'
urne A, une boule noire, ce qui conserve dans cette urne, X
boules blanches. Ainsi (..) étant après l' opération (..) , le
nombre des boules noires de l' urne A, et X étant celui des
boules noires de l' urne B, ( (..) ) est encore une partie de (..) .
S' il y a (..) boules blanches dans l' urne A après l' opération
,
p288
et que l' opération suivante en fasse sortir une boule noire, et
y fasse rentrer une boule blanche ; il y aura X boules blanches
dans l' urne A après l' opération ( (..) ) ; le nombre des cas dans
lesquels cela peut arriver, est le produit de (..) par le nombre
des boules noires de l' urne A après le tirage (..) , et par le
nombre (..) des boules blanches de l' urne B, après la même
opération ; (..) est donc encore une partie de (..) . Enfin, s' il y
a (..) boules blanches dans l' urne A après l' opération (..) , et
que l' opération suivante en fasse sortir une boule blanche, et y
fasse rentrer une boule noire ; il y aura encore, après cette
dernière opération, X boules blanches dans l' urne. Le nombre
des cas dans lesquels cela peut arriver, est le produit de (..)
par le nombre (..) des boules blanches de l' urne A, et par le
nombre (..) des boules noires de l' urne B après l' opération (..)
; (..) est donc encore une partie de (..) . Enunissant toutes ces
parties, et en égalant leur somme à (..) , on aura l' équation aux
différences finies partielles, (..) . Quoique cette équation soit
aux différences du second ordre par rapport à la variable X,
cependant son intégrale ne renferme qu' une fonction arbitraire
qui dépend de la probabilité des diverses valeurs de X dans l'
état initial de l' urne A. En effet, il est visible que si l' on
connaît les valeurs de (..) correspondantes à toutes les valeurs
de X, depuis (..) ; l' équation précédente donnera toutes les
valeurs de (..) , en observant que les valeurs négatives de X
étant impossibles, (..) est nul lorsque X est négatif. Si N est
un très-grand nombre, cette équation se transforme dans une
équation aux différences partielles que l' on obtient ainsi. On a
alors à très-peu près, (..) .
p289
Soit (..) ; l' équation précédente aux différences finies
partielles deviendra, en négligeant les termes de l' ordre (..) .
Pour intégrer cette équation qui, comme on peut s' en assurer par
la thode que j' ai donnée pour cet objet, dans les mémoires de
l' académie des sciences, de l' année 1773, n' est intégrale en
termes finis, qu' au moyen d' intégrales définies ; faisons (..) .
p290
Il est facile de voir que l' équation précédente, aux limites de
l' ingrale, exige que les limites de l' intégrale relative à S
, soient prises depuis (..) . En prenant le radical (..) , avec le
signe (..) , on aurait pour U une expression de cette forme, (..) ,
la fonction arbitraire (..) pouvant être différente de (..) . La
somme de ces deux expressions de U sera sa valeur complette.
Mais il est facile de s' assurer que les intégrales étant prises
depuis (..) , l' addition de cette nouvelle expression de U n'
ajoute rien à la généralité de la première, dans laquelle elle
est comprise. Développons maintenant le second membre de l'
équation (A), suivant les puissances de (..) , et considérons un
des termes de ce développement, tel que (..) ; ce terme devient,
après les intégrations, (..) . Considérons encore un terme de ce
veloppement, relatif aux
p291
puissances impaires de (..) , tel que (..) . Ce terme devient, après
les intégrations, (..) . On aura donc ainsi l' expression nérale
de la probabilité U, développée dans une série ordonnée suivant
les puissances de (..) , série qui devient très-convergente,
lorsque (..) est un nombre considérable. Cette expression doit
être telle, que (..) soit égale à l' unité, les intégrales étant
étendues à toutes les valeurs de X et de (..) , c' est-à-dire
depuis X nul jusqu' à (..) , et depuis (..) ; car il est certain
que l' une des valeurs de X devant avoir lieu, la somme des
probabilités de toutes ces valeurs doit être égale à l' unité. En
prenant l' intégrale (..) dans les limites de (..) , on a le même
sultat à très-peu près, qu' en la prenant depuis (..) : la
différence n' est que de l' ordre (..) ; et vu l' extrême rapidité
avec laquelle (..) diminue à mesure que N augmente, on voit que
cette différence est insensible lorsque N est un grand nombre.
Cela posé, considérons dans l' intégrale (..) , le terme (..) . Le
facteur (..) est égal à ( (..) ) ; il est donc nul,
p292
excepté dans le cas de (..) , où il se réduit à l' unité. Il est
visible que les termes de l' expression de U qui renferment des
puissances impaires de (..) , donnent un résultat nul dans l'
intégrale (..) , étendue depuis (..) ; car ces termes ont pour
facteur (..) , et l' on a généralement dans ces limites, (..) . Il n'
y a donc que le premier terme de l' expression de U, terme que
nous représenterons par (..) , qui puisse donner un résultat dans
l' ingrale (..) , et ce résultat est (..) ; on a donc (..) . L'
expressionnérale de U a ainsi la forme suivante, (..) ; (..)
étant des constantes interminées qui dépendent de la valeur
initiale de U. Supposons que U devienne X lorsque R est nul,
X étant une fonction donnée de (..) . On a généralement ces deux
théorèmes, (..) , lorsque Q est moindre que I ; (..) étant des
fonctions de (..) , par lesquelles (..) sont multipliés dans l'
expression de U. Pour démontrer ces théorèmes, nous observerons
p293
que, par ce qui préde, (..) est égal à (..) ; il faut donc faire
voir que l' on a (..) ; les intégrales étant prises depuis (..) . En
intégrant d' abord par rapport à (..) , ce terme devient (..) . En
continuant d' intégrer ainsi par parties relativement à (..) , on
parvient enfin à des termes de la forme (..) , E n' étant pas zéro
, et par ce qui précède, ces termes sont nuls. On prouvera de la
même manière, que l' on a (..) . De là il suit que l' on a
généralement (..) , (..) étant des nombres difrens. Car si, par
exemple, (..) est plus grand que I, toutes les puissances de (..)
dans (..) , sont moindres que (..) ; chacun des termes de (..)
donnera donc, par ce qui précède, un résultat nul dans l'
intégrale (..) . Le même raisonnement a lieu pour l' intégrale (..) .
Mais ces intégrales ne sont pas nulles, lorsque (..) . On les
p294
obtiendra dans ce cas, de cette manière. On a, par ce qui précède
, (..) . Le terme qui a pour facteur (..) dans cette expression, est
; or, on peut ne considérer que ce terme dans le premier
facteur (..) de l' intégrale (..) ; car les puissances inférieures
de (..) , dans ce facteur, donnent un résultat nul dans l'
intégrale. On a donc (..) . On a, en intégrant par rapport à (..) ,
depuis (..) . Le premier terme du second membre de cette équation
est nul par ce qui précède ; ce membre se réduit donc à son
second terme. On trouve de la même manière, que l' on a (..) .
p295
On trouvera de la même manière, (..) . On a évidemment, (..) , dans
le cas même où (..) sont égaux, parce que le produit (..) ne
contient que des puissances impaires de (..) . Cela posé. L'
expressionnérale de U donne pour sa valeur initiale, que nous
avonssignée par X, (..) . Si l' on multiplie cette équation par
, et si l' on prend les intégrales depuis (..) , on aura, en
vertu des théorèmes précédens, (..) . On aura donc ainsi les
valeurs successives de (..) ; (..) , au moyen d' intégrales définies
, lorsque X ou la valeur initiale de U sera done. Dans le cas
X est égal à (..) , l' expression générale de U prend une
forme très-simple. Alors la fonction arbitraire
p296
de la formule (A) est de la forme (..) . Pour déterminer les
constantes (..) , nous observerons qu' en supposant (..) . En faisant
ensuite (..) , et observant que l' intégrale relative à S devant
être prise depuis (..) , l' intégrale relative à (..) doit être
prise dans les mêmes limites, on aura (..) . En comparant cette
expression à la valeur initiale de U, qui est (..) , valeur que l'
on obtient encore, par la condition que (..) ,
p297
l' ingrale étant prise depuis (..) ; on aura donc pour l'
expression de U, quel que soit (..) . On trouve en effet, que
cette valeur de U, substituée dans l' équation aux
différentielles partielles en U, y satisfait. (..) diminuant sans
cesse quand (..) augmente, la valeur de U varie sans cesse, et
devient à sa limite, lorsque (..) est infini, (..) . Pour donner une
application de ces formules, imaginons dans une urne C, un très-
grand nombre M de boules blanches, et un pareil nombre de boules
noires. Ces boules ayant été mêlées, supposons que l' on tire de
l' urne, N boules que l' on met dans l' urne A. Supposons
ensuite que l' on mette dans l' urne B, autant de boules
blanches, qu' il y a de boules noires dans l' urne A, et autant
de boules noires, qu' il y a de boules blanches dans la même urne
. Il est clair que le nombre des cas dans lesquels il y aura X
boules blanches, et par conséquent (..) boules noires dans l' urne
A, est égal au produit du nombre des combinaisons des M boules
blanches de l' urne C, prises Xàx, par le nombre des
combinaisons des M boules noires de la même urne, prises (..) . Ce
produit est, par le N 3, égal à (..) . Le nombre de tous les cas
possibles est le nombre des combinaisons des 2 m boules de l'
urne C, prisesn ; ce nombre est (..) ; en divisant la
fraction précédente par celle-ci, on aura, pour la
p298
probabilité de X, ou pour la valeur initiale de U, (..) .
Maintenant, si l' on observe que l' on a à très-peu près, lorsque
S est un grand nombre, (..) ; on trouvera facilement après toutes
les réductions, en faisant (..) , et engligeant les quantités de
l' ordre (..) , qui ne sont pas multipliées par (..) . Si le nombre
M est infini, alors (..) , et la valeur initiale de U est (..) . Sa
valeur, après un nombre quelconque de tirages, est (..) . Le cas de
M infini revient à celui dans lequel les urnes Aetb seraient
remplies, en projetant N fois une pièce qui anerait
indifféremment croix ou pile , et mettant dans l' urne A, une
boule
p299
blanche, chaque fois que croix arriverait, et une boule noire
, chaque fois que pile arriverait ; et faisant l' inverse
pour l' urne B. Car il est visible que la probabilité de tirer
une boule blanche de l' urne C, est alors (..) , comme celle d'
amener croix ou pile . En prenant l' intégrale (..) , depuis (..)
, on aura la probabilité que le nombre des boules blanches de l'
urne A, sera compris dans les limites (..) . On peut généraliser
le résultat précédent, en supposant l' urne A remplie comme au
commencement de ce numéro, par la projection d' un prisme de (..)
faces latérales, dont P sont blanches et Q sont noires. On a vu
qu' alors si l' on fait (..) . Supposons Petq très-peu différens,
ensorte que l' on ait (..) .
p300
Supposons maintenant qu' après un nombre quelconque de tirages,
on ait (..) , (..) étant des fonctions de (..) . Si l' on substitue
cette valeur dans l' équation aux différences partielles en U,
on aura (..) . En les intégrant, et observant qu' à l' origine de
, on aura (..) . Cherchons maintenant la valeur moyenne du nombre
des boules blanches contenues dans l' urne A, après R tirages.
Cette valeur est la somme des produits des divers nombres des
boules blanches, multipliées par leurs probabilités respectives ;
elle est donc égale à l' intégrale (..) , prise depuis (..) . En
substituant pour U sa valeur donnée par la formule (K), on aura
, en vertu des théorèmes précédens, pour cette intégrale, (..) . à
l' origine où R est nul, cette valeur est (..) ; ainsi l' on aura
p301
au moyen du nombre des boules blanches que l' urne A contient
à cette origine. On peut obtenir fort simplement de la manière
suivante, la valeur moyenne du nombre des boules blanches, après
R tirages. Imaginons que chaque boule blanche ait une valeur que
nous représenterons par l' unité, les boules noires étant
supposées n' avoir aucune valeur. Il est clair que le prix de l'
urne A sera la somme des produits de tous les nombres possibles
de boules blanches qui peuvent exister dans l' urne, multipliés
par leurs probabilités respectives ; ce prix est donc ce que nous
avons nommé valeur moyenne du nombre des boules blanches .
Nommons-le Z, après le tirage (..) . Au tirage suivant, s' il sort
une boule blanche, ce prix diminue d' une unité ; or si l' on
suppose que X est le nombre des boules blanches contenues dans
l' urne après le tirage (..) , la probabilité d' en extraire une
boule blanche sera (..) ; en nommant donc U la probabilité de
cette supposition, l' intégrale (..) , étendue depuis (..) , sera la
diminution de Z, résultante de la probabilité d' extraire une
boule blanche, de l' urne. Si l' on fait, comme ci-dessus, (..) ,
et si l' on désigne la fraction très-petite (..) , cette diminution
sera égale à (..) ; car Z est égal à (..) , somme des produits des
nombres des boules blanches, par leurs probabilités respectives.
Le prix de l' urne A s' accroît, si l' on extrait une boule
blanche de l' urne B, pour la mettre dans l' urne A ; or, X
étant supposé le nombre des boules blanches de l' urne A, (..)
sera celui des boules blanches de l' urne B, et la probabilité
d' extraire une boule blanche de cette dernière urne, sera (..) ;
en multipliant cette probabilité par la probabilité U de x ; l'
intégrale (..) , prise depuis X nul jusqu' à (..) , sera l'
accroissement de Z (..) est le prix de l' urne B ; en nommant
donc (..) ce prix, (..) sera l' accroissement de Z : on aura donc
. La somme des prix des deux urnes est évidemment égale à N,
p302
nombre des boules blanches qu' elles contiennent, ce qui donne
; substituant cette valeur de (..) dans l' équation précédente,
elle devient (..) , (..) étant une constante arbitraire ; ce qui est
conforme à ce qui précède. On peut étendre toute cette analyse,
au cas d' un nombre quelconque d' urnes ; nous nous bornerons ici
à chercher la valeur moyenne du nombre des boules blanches que
chaque urne contient après R tirages. Considérons un nombre E
d' urnes, disposées circulairement, et renfermant chacune le
nombre N de boules, les unes blanches, et les autres noires ; N
étant supposé un très-grand nombre. Supposons qu' après R
tirages, (..) soient les prix respectifs des diverses urnes.
Chaque tirage consiste à extraire en même tems, une boule de
chaque urne, et à la mettre dans la suivante, en partant de l'
une d' elles dans un sens déterminé. Si l' on fait (..) ; on aura,
par le raisonnement que nous venons de faire relativement à deux
urnes, (..) ; cette équation a lieu depuis (..) . Dans le cas de (..)
, on a (..) ; en intégrant ces équations, et supposant qu' à l'
origine les prix respectifs de chaque urne, ou les nombres des
boules blanches qu' elles contiennent, soient (..) . On parvient à
ce résultat qui a lieu depuis (..) ,
p303
le signe S s' étendant à toutes les valeurs de S, depuis (..) ,
et A étant égal à (..) . Le terme de cette expression
correspondant à (..) , est indépendant de (..) , et égal à (..) ; c'
est-à-dire, à la somme entière des boules blanches des urnes,
divisée par leur nombre. Ce terme est la limite de l' expression
de (..) ; d' où il suit qu' après un nombre infini de tirages, les
prix de chaque urne sont égaux entre eux.
p347
Quand on n' a qu' un élément à déterminer, cette méthode ne
laisse aucun embarras ; mais lorsque l' on doit corriger à la
fois plusieurs élémens, il faut avoir autant d' équations finales
formées par la réunion de plusieurs équations de condition, et au
moyen desquelles on détermine par l' élimination, les corrections
des élémens. Mais quelle est la manière la plus avantageuse de
combiner les équations de condition, pour former les équations
finales ? C' est ici que les observateurs s' abandonnaient à des
tâtonnemens arbitraires qui devaient les conduire à des résultats
différens, quoiqueduits des mêmes observations. Pour éviter
ces tâtonnemens, M Legendre eut l' idée simple de considérer la
somme des carrés des erreurs des observations, et de la rendre un
minimum ; ce qui fournit directement autant d' équations
finales, qu' il y a d' élémens à corriger. Ce savant géomètre est
le premier qui ait publié cette méthode ; mais on doit à M
Gauss la justice d' observer qu' il avait eu, plusieurs années
avant cette publication, la même ie dont il faisait un usage
habituel, et qu' il avait communiquée à plusieurs astronomes. M
Gauss, dans sa théorie du mouvement elliptique, a cherché à
rattacher cette méthode à la théorie des probabilités, en faisant
voir que la même loi des erreurs des observations, qui donne
généralement lagle du milieu arithmétique entre plusieurs
observations, admise par les observateurs, donne pareillement la
règle des moindres carrés des erreurs des observations ; et c'
est ce qu' on a vu dans le N 23. Mais comme rien ne prouve
p348
que la première de ces règles donne le résultat le plus
avantageux, la même incertitude existe par rapport à la seconde.
La recherche de la manière la plus avantageuse de former les
équations finales, est sans doute une des plus utiles de la
théorie des probabilités : son importance dans la physique et l'
astronomie, me porta à m' en occuper. Pour cela, je consirai
que toutes les manières de combiner les équations de condition,
pour en former une équation finale linéaire, revenaient à les
multiplier respectivement par des facteurs qui étaient nuls
relativement aux équations que l' on n' employait point, et à
faire une somme de tous ces produits ; ce qui donne une première
équation finale. Un second système de facteurs donne une seconde
équation finale, et ainsi de suite, jusqu' à ce que l' on ait
autant d' équations finales, que d' élémens à corriger.
Maintenant, il est visible qu' il faut choisir les systèmes de
facteurs, de sorte que l' erreur moyenne à craindre en plus ou en
moins sur chaque élément, soit un minimum ; l' erreur moyenne
étant la somme des produits de chaque erreur par sa probabilité.
Lorsque les observations sont en petit nombre, le choix de ces
systèmespend de la loi des erreurs de chaque observation. Mais
si l' on considère un grand nombre d' observations, ce qui a lieu
le plus souvent dans les recherches astronomiques ; ce choix
devient indépendant de cette loi ; et l' on a vu dans ce qui
précède, que l' analyse conduit alors directement aux résultats
de la méthode des moindres carrés des erreurs des observations.
Ainsi cette méthode qui n' offrait d' abord que l' avantage de
fournir, sans tâtonnement, les équations finales nécessaires à la
correction des élémens, donne en me tems les corrections les
plus précises, du moins lorsqu' on ne veut employer que des
équations finales qui soient linéaires, condition indispensable,
lorsque l' on considère à la fois un grand nombre d' observations
; autrement, l' élimination des inconnues et leur détermination
seraient impraticables.
p349
application du calcul des probabilités, à la recherche des
phénones et de leurs causes. 25 les phénomènes de la nature
se présentent le plus souvent accompagnés de tant de
circonstances étrangères ; un si grand nombre de causes
perturbatrices y mêlent leur influence, qu' il est très-difficile
, lorsqu' ils sont très-petits, de les reconnaître. On ne peut
alors y parvenir, qu' en multipliant les observations, afin que
les effets étrangers venant à setruire, le résultat moyen des
observations ne laisse plus apercevoir que ces phénones. On
conçoit par ce qui précède, que cela n' a lieu rigoureusement,
que dans le cas d' un nombre infini d' observations. Dans tout
autre cas, les phénomènes ne sont indiqués par les résultats
moyens, que d' une manière probable, mais qui l' est d' autant
plus, que les observations sont en plus grand nombre. La
recherche de cette probabilité est donc très-importante pour la
physique, l' astronomie, et généralement pour toutes les sciences
naturelles. On va voir qu' elle rentre dans lesthodes que nous
venons d' exposer. Dans le chapitre précédent, l' existence du
phénomène était certaine ; son étendue seule a é l' objet du
calcul des probabilités : ici l' existence du phénomène et son
étendue, sont l' objet de ce calcul. Prenons pour exemple, la
variation diurne du baromètre, que l' on observe entre les
tropiques, et qui devient sensible même dans nos climats, lorsque
l' on choisit et que l' on multiplie convenablement les
observations. On a reconnu qu' en général, vers neuf heures du
matin, le baromètre est plus élevé que vers quatre heures du soir
; ensuite il remonte jusque vers onze heures du soir, et il
redescend jusque vers quatre heures du matin, pour revenir à son
maximum de hauteur, vers neuf heures. Supposons
p350
que l' on ait observé la hauteur du barotre vers neuf heures du
matin et vers quatre heures du soir, pendant le nombre S de
jours ; et pour éviter la trop grande influence des causes
perturbatrices, choisissons ces jours de manière que dans l'
intervalle de neuf heures à quatre heures, le baromètre n' ait
pas varié au-delà de quatre millimètres. Supposons ensuite qu' en
faisant la somme des S hauteurs du matin, et la somme des S
hauteurs du soir, la première de ces sommes surpasse la seconde
de la quantité Q ; cette différence indiquera une cause
constante qui tend à élever le baromètre vers neuf heures du
matin, et à l' abaisser vers quatre heures du soir. Pour
déterminer avec quelle probabilité cette cause est indiquée,
concevons que cette cause n' existe point, et que la différence
observée Q, résulte des causes perturbatrices accidentelles, et
des erreurs des observations. La probabilité qu' alors la
différence observée entre les sommes des hauteurs du matin et du
soir, doit être au-dessous de Q, est, par le N 18, égale à (..) ,
l' intégrale étant prise depuis (..) étant des constantes
dépendantes de la loi de probabilité des différences entre les
hauteurs du matin et du soir, et (..) étant les limites de ces
différences, A étant ici égal à quatre millimètres. (..) étant au
moins égal à six, comme on l' a vu dans le N 20 (..) ne peut pas
être supposé moindre que (..) ; en faisant donc (..) , et supposant
l' étendue de la variation diurne, d' un millimètre, ce qui est à
peu près ce que M Ramond a trouvé dans nos climats, par la
comparaison d' un très-grand nombre d' observations, on aura (..) .
Ainsi (..) est au moins égal à 37, 5 ; en faisant donc (..) ,
p351
la probabilité précédente devient au moins (..) , l' intégrale
étant prise depuis (..) . Cette intégrale est à fort peu près, par
le N 27 du premier livre, (..) , et elle approche tellement de l'
unité ou de la certitude, qu' il est extrêmement probable que s'
il n' existait point de cause constante de l' excès observé de la
somme des hauteurs barométriques du matin, sur celles des
hauteurs du soir, cet excès serait plus petit que (..) ; il
indique donc avec une extrême vraisemblance, l' existence d' une
cause constante qui l' a produit. Le phénone d' une variation
diurne étant ainsi bien constaté, déterminons la valeur la plus
probable de son étendue, et l' erreur que l' on peut commettre
sur son évaluation. Supposons pour cela, que cette valeur soit
; la probabilité que l' étendue de la variation diurne du matin
au soir, sera comprise dans ces limites, est, par le N 18, (..) ,
l' intégrale étant prise depuis (..) . On peut éliminer (..) , en
observant que par le N 20, cette fraction est à peu près égale à
étant la différence de (..) à l' étendue observée le ( (..) ) jour
, et le signe S s' étendant à toutes les valeurs de I, depuis
; en faisant donc (..) ,
p352
la probabilité que l' étendue de la variation diurne du matin au
soir, est comprise dans les limites (..) , sera (..) , l' intégrale
étant prise depuis T nul. La variation diurne des hauteurs du
baromètre, dépend uniquement du soleil ; mais ces hauteurs sont
encore affectées par les marées aériennes que produit l'
attraction du soleil et de la lune sur notre atmosphère, et dont
j' ai donné la théorie dans le quatrième livre de la mécanique
leste. Il est donc nécessaire de considérer à la fois ces deux
variations, et de déterminer leurs grandeurs et leurs époques
respectives, en formant des équations de condition analogues à
celles dont les astronomes font usage, pour corriger les élémens
des mouvemens célestes. Ces variations étant principalement
sensibles à l' équateur, et les causes perturbatrices y étant
extrêmement petites ; on pourra, au moyen d' excellens baromètres
, les déterminer avec une grande précision ; et je ne doute point
que l' on ne reconnaisse alors, dans l' ensemble d' un très-grand
nombre d' observations, les lois qu' indique la théorie de la
pesanteur dans les marées atmosphériques, et qui se manifestent
d' une manière si frappante dans les observations des marées de
l' océan, que j' ai discutées avec étendue, dans le livre cité de
la mécanique céleste. On voit, par ce qui précède, que l' on peut
reconnaître l' effet très-petit d' une cause constante, par une
longue suite d' observations dont les erreurs peuvent excéder cet
effet lui-même. Mais alors, il faut avoir soin de varier les
circonstances de chaque observation, de manière que le résultat
moyen de leur ensemble, n' en soit point altéré sensiblement, et
soit presqu' entièrement l' effet de la cause dont il s' agit :
il faut ensuite multiplier les observations, jusqu' à ce que l'
analyse indique une très-grande probabilité que l' erreur de ce
sultat sera comprise dans des limites très-rapprochées.
Supposons, par exemple, que l' on veuille reconnaître par l'
observation, la petite déviation à l' est, produite par la
rotation de la terre, dans la chute des corps. J' ai fait voir
dans le dixième livre de la mécanique céleste, que si du sommet
d' une tour fort élevée, on
p353
abandonne un corps à sa pesanteur ; il retombera sur un plan
horizontal passant par le pied de la tour, à une petite distance
à l' est du point de contact de ce plan avec une boule suspendue
par un fil dont le point de suspension est celui du départ du
corps. J' ai donné dans le livre cité, l' expression de cette
déviation, et il en résulte qu' en faisant abstraction de la
sistance de l' air, elle est uniquement vers l' est ; qu' elle
est proportionnelle au cosinus de la latitude, et à la racine
carrée du cube de la hauteur, et qu' à la latitude du point de
départ, elle s' élève à 5, 1 millimètres, lorsque la hauteur
de la tour est de 50 mètres. Lasistance de l' air change ce
derniersultat : j' en ai donné pareillement l' expression dans
ce cas, au livre cité. On a défait un grand nombre d'
expériences pour confirmer, par ce moyen, le mouvement de
rotation de la terre, qui d' ailleurs est démontré par tant d'
autres phénomènes, que cette confirmation devient inutile. Les
petites erreurs de ces expériences très-délicates, ont souvent
excédé l' effet que l' on voulait déterminer ; et ce n' est qu'
en multipliant considérablement les expériences, que l' on peut
ainsi constater son existence et fixer sa valeur. Nous allons
soumettre cet objet à l' analyse des probabilités. Si l' on prend
pour origine des coordonnées, le point de contact du plan et de
la boule suspendue par un fil dont le sommet de suspension est
celui du départ d' une balle que l' on fait tomber ; si l' on
marque ensuite sur ce plan, les divers points où la balle va
toucher le plan dans chaque expérience ; enterminant le centre
commun de gravité de ces points, la ligne menée de l' origine des
coordonnées à ce centre,terminera le sens et la quanti
moyenne dont la balle s' est écartée de cette origine ; et l' un
et l' autre seront déterminés avec d' autant plus d' exactitude,
que les expériences seront plus nombreuses et plus précises.
Considérons maintenant, comme axe des abscisses, la ligne menée
de l' origine des coordonnées, à l' est ; et désignons par (..)
les coordonnées respectives des points déterminés par les
expériences dont le nombre est S. En exprimant par Xety les
coordonnées du centre de gravité de
p354
tous ces points ; on aura (..) , le signe S s' étendant à toutes
les valeurs de I, depuis (..) . Cela posé, en désignant par (..)
les limites des erreurs de chaque expérience, dans le sens des X
; la probabilité que l' écart moyen de la balle, du point origine
des coordonnées, est compris dans les limites (..) , sera, par le
N 18, (..) étant des constantes qui dépendent de la loi de
facilité des erreurs de chaque expérience dans le sens des X.
Pareillement, (..) étant les limites des erreurs de chaque
expérience dans le sens des Y ; la probabilité que la valeur
moyenne de la déviation dans le sens des Y, est comprise dans
les limites (..) , sera (..) , (..) étant des constantes dépendantes
de la loi des erreurs des expériences dans le sens des Y. Les
fractions (..) étant, par ce qui précède, plus grandes que (..) ;
on pourra juger du degré d' approximation et de probabilité des
valeurs de Xetdey, et déterminer la probabilité de l' écart au
sud et au nord, indiqué par les observations. L' analyse
précédente peut encore être appliquée à la recherche des petites
inégalités des mouvemens célestes, dont l' étendue est comprise
dans les limites, soit des erreurs des observations, soit des
perturbations produites par les causes accidentelles. C' est à
peu près ainsi que Ticho-Brahé reconnut que l' équation du tems
, relative au soleil et aux planètes, n' était point applicable à
la lune,
p355
et qu' il fallait en retrancher la partie dépendante de l'
anomalie du soleil, et même une quantité beaucoup plus grande ;
ce qui conduisit Flamsteed à lacouverte de l' inégalité
lunaire que l' on nomme équation annuelle . C' est encore dans
les résultats d' un grand nombre d' observations, que Mayer
reconnut que l' équation de la précession, relative aux planètes
et aux étoiles, n' était point applicable à la lune ; il évalua à
décimales environ, la quantité dont il fallait alors la
diminuer, quantité que Mason éleva ensuite à près de (..) , par la
comparaison de toutes les observations de Bradley, et que M
Burg a duite à (..) , au moyen d' un bien plus grand nombre d'
observations de Maskeline. Cette inégalité, quoiqu' indiquée par
les observations, était négligée par le plus grand nombre des
astronomes ; parce qu' elle ne paraissait pas résulter de la
théorie de la pesanteur universelle. Mais ayant soumis son
existence au calcul des probabilités, elle me parut indiquée avec
une probabilité si forte, que je crus devoir en rechercher la
cause. Je vis bientôt qu' elle ne pouvait résulter que de l'
ellipticité du sphéroïde terrestre, que l' on avait négligée
jusqu' alors dans la théorie du mouvement lunaire, comme ne
devant y produire que des termes insensibles ; et j' en conclus
qu' il était extrêmement vraisemblable que ces termes devenaient
sensibles par les intégrations successives des équations
différentielles. Ayant déterminé ces termes par une analyse
particulière, que j' ai exposée dans le septième livre de la
canique céleste ; je découvris d' abord l' inégalité du
mouvement de la lune en latitude, et qui est proportionnelle au
sinus de sa longitude : par son moyen, je reconnus que la théorie
de la pesanteur donne effectivement la diminution observée par
les astronomes cités, dans l' igalité de la précession,
applicable au mouvement lunaire en longitude. La quantité de
cette diminution, et le coefficient de l' inégalité en latitude
dont je viens de parler, sont donc très-propres à déterminer l'
aplatissement de la terre. Ayant fait part de mes recherches à M
Burg qui s' occupait alors de ses tables de la lune ; je le
priai de déterminer avec un soin particulier, les coefficiens de
ces deux inégalités. Par un concours remarquable, les coefficiens
qu' il a déterminés, s' accordent à donner à la terre, l'
aplatissement (..) , aplatissement qui diffère peu du milieu conclu
p356
des mesures des degrés du méridien et du pendule ; mais qui vu l'
influence des erreurs des observations et des causes
perturbatrices, sur ces mesures, me paraît plus exactement
déterminé par les inégalités lunaires. M Burckhardt qui vient
de former de nouvelles tables de la lune, très-précises, sur l'
ensemble des observations de Bradley et de Maskeline, a trou
le même coefficient que M Burg, pour l' inégalité lunaire en
latitude : il trouve un trente-quatrième à ajouter au coefficient
de l' inégalité en longitude, ce qui réduit l' aplatissement à
, par cette inégalité. La différence très-légère de ces
sultats, prouve qu' en fixant à (..) , cet aplatissement, l'
erreur est insensible. L' analyse des probabilités m' a conduit
pareillement à la cause des grandes irrégularités de Jupiter et
de Saturne. La difficulté d' en reconnaître la loi, et de les
ramener à la théorie de l' attraction universelle, avait fait
conjecturer qu' elles étaient dues aux actions passagères des
comètes ; mais un théorème auquel j' étais parvenu sur l'
attraction mutuelle des planètes, me fit rejeter cette hypothèse,
en m' indiquant l' attraction mutuelle des deux planètes, comme
la vraie cause de ces irrégularités. Suivant ce théorème, si le
mouvement de Jupiter s' accélère en vertu de quelque grande
inégalité à très-longue période ; celui de Saturne doit se
ralentir de la même manière, et ce ralentissement est à l'
accélération de Jupiter, comme le produit de la masse de cette
dernière planète, par la racine carrée du grand axe de son orbite
, est au produit semblable relatif à Saturne. Ainsi en prenant
pour unité, le ralentissement de Saturne, l' accélération
correspondante de Jupiter doit être 0, 40884 ; or Halley
avait trouvé, par la comparaison des observations modernes aux
anciennes, que l' accélération de Jupiter correspondait au
ralentissement de Saturne, et qu' elle était 0, 44823 de ce
ralentissement. Ces résultats, si bien d' accord avec la théorie,
me portèrent à penser qu' il existe dans les mouvemens de ces
plates, deux grandes inégalités correspondantes et de signe
contraire, qui produisaient ces phénones. J' avais reconnu que
l' action mutuelle des planètes ne pouvait point occasionner dans
leurs moyens mouvemens, des variations toujours croissantes, ou
p357
périodiques, mais d' une période indépendante de leur
configuration mutuelle ; c' était donc dans le rapport des moyens
mouvemens de Jupiter et de Saturne, que je devais chercher
celle dont il s' agit ; or en examinant ce rapport, il est facile
de reconnaître que deux fois le moyen mouvement de Jupiter ne
surpasse que d' une quantité très-petite, cinq fois celui de
Saturne ; ainsi les inégalités qui dépendent de cette différence
, et dont la période est d' environ neuf siècles, peuvent devenir
fort grandes par les intégrations successives qui leur donnent
pour diviseur, le carré du coefficient très-petit du tems, dans
l' argument de ces inégalités. En fixant vers l' époque de Tycho
-Brahé, l' origine de cet argument ; je voyais que Halley avait
trouver par la comparaison des observations modernes aux
anciennes, les altérations qu' il avait observées ; tandis que la
comparaison des observations modernes entre elles, devait
présenter des altérations contraires et pareilles à celles que
Lambert avait remarquées. L' existence des inégalités dont je
viens de parler, me parut donc extrêmement vraisemblable, et je
n' hésitai point à entreprendre le calcul long et pénible,
nécessaire pour m' en assurer complettement. Le résultat de ce
calcul, non-seulement les confirma, mais il me fit connaître
beaucoup d' autres inégalités dont l' ensemble a porté les tables
de Jupiter et de Saturne, au degré de précision des
observations mêmes. On voit par là combien il faut être attentif
aux indications de la nature, lorsqu' elles sont lesultat d'
un grand nombre d' observations, quoique d' ailleurs elles soient
inexplicables par les moyens connus. J' engage ainsi les
astronomes à suivre avec une attention particulière, l' inégalité
lunaire à longue période, qui dépend principalement du mouvement
du périgée de la lune, ajouté au double du moyen mouvement de ses
noeuds ; inégalité dont j' ai parlé dans le septième livre de la
canique céleste, et que déles observations indiquent avec
beaucoup de vraisemblance. Les cas précédens ne sont pas les
seuls dans lesquels les observations ont redressé les analystes.
Le mouvement durigée lunaire et l' accélération du mouvement
de la lune, qui n' étaient point donnés d' abord par les
approximations, ont fait sentir la nécessité de rectifier ces
approximations. Ainsi, l' on peut
p358
dire que la nature elle-même a concouru à la perfection
analytique des théories fondées sur le principe de la pesanteur
universelle ; et c' est à mon sens, une des plus fortes preuves
de la vérité de ce principe admirable. On peut encore, par l'
analyse des probabilités, vérifier l' existence ou l' influence
de certaines causes dont on a cru remarquer l' action sur les
êtres organisés. De tous les instrumens que nous pouvons employer
pour connaître les agens imperceptibles de la nature, les plus
sensibles sont les nerfs, surtout lorsque leur sensibilité est
exaltée par des circonstances particulières. C' est à leur moyen,
que l' on a découvert la faible électricité que développe le
contact de deux métaux hétérogènes ; ce qui a ouvert un champ
vaste aux recherches des physiciens et des chimistes. Les
phénones singuliers qui résultent de l' extrême sensibilité des
nerfs dans quelques individus, ont donné naissance à diverses
opinions sur l' existence d' un nouvel agent que l' on a nom
magnétisme animal , sur l' action du magnétisme ordinaire et l'
influence du soleil et de la lune, dans quelques affections
nerveuses ; enfin, sur les impressions que peut faire naître la
proximité des métaux ou d' une eau courante. Il est naturel de
penser que l' action de ces causes est très-faible, et peut
facilement être troube par un grand nombre de circonstances
accidentelles ; ainsi de ce que, dans quelque cas, elle ne s' est
point manifestée, on ne doit pas conclure qu' elle n' existe
jamais. Nous sommes si éloignés de connaître tous les agens de la
nature, qu' il serait peu philosophique de nier l' existence des
phénones, uniquement parce qu' ils sont inexplicables dans l'
état actuel de nos connaissances. Seulement nous devons les
examiner avec une attention d' autant plus scrupuleuse, qu' il
paraît plus difficile de les admettre ; et c' est ici que l'
analyse des probabilités devient indispensable pour déterminer
jusqu' à quel point il faut multiplier les observations ou les
expériences, pour avoir en faveur de l' existence des agens qu'
elles semblent indiquer, une probabilité supérieure à toutes les
raisons que l' on peut avoir d' ailleurs de la rejeter. Lame
analyse peut être étendue aux divers résultats de la médecine et
de l' économie politique, et même à l' influence des
p359
causes morales ; car l' action de ces causes, lorsqu' elle est
pétée un grand nombre de fois, offre dans ses résultats, autant
de régularité, que les causes physiques. On peut encore
déterminer par l' analyse des probabilités, comparée à un grand
nombre d' expériences, l' avantage et le désavantage des joueurs,
dans les cas dont la complication rend impossible leur recherche
directe. Tel est l' avantage de la main, au jeu du piquet :
telles sont encore les possibilités respectives d' amener les
différentes faces d' un prisme droit rectangulaire, dont la
longueur, la largeur et la hauteur sont inégales ; lorsque le
prisme projeté en l' air, retombe sur un plan horizontal. Enfin,
on pourrait faire usage du calcul des probabilités, pour
rectifier les courbes ou carrer leurs surfaces. Sans doute, les
géomètres n' emploiront pas ce moyen ; mais comme il me donne
lieu de parler d' un genre particulier de combinaisons du hasard,
je vais l' exposer en peu de mots. Imaginons un plan divisé par
des lignes parallèles, équidistantes de la quantité A ;
concevons de plus un cylindre très-étroit dont 2 r soit la
longueur, supposée égale ou moindre que A. On demande la
probabilité qu' en le projetant, il rencontrera une des divisions
du plan. élevons sur un point quelconque d' une de ces divisions,
une perpendiculaire prolongée jusqu' à la division suivante.
Supposons que le centre du cylindre soit sur cette
perpendiculaire, et à la hauteur Y au-dessus de la première de
ces deux divisions. En faisant tourner le cylindre autour de son
centre, et nommant (..) l' angle que le cylindre fait avec la
perpendiculaire, au moment où il rencontre cette division ; (..)
sera la partie de la circonférence décrite par chaque extrémi
du cylindre, dans laquelle il rencontre la division ; la somme de
toutes ces parties sera donc (..) ; cette somme est donc (..) . Pour
déterminer cette constante, nous observerons que l' intégrale
doit s' étendre depuis Y nul jusqu' à (..) , et par conséquent
depuis
p360
; ainsi la somme dont il s' agit est 4 r. Depuis (..) jusqu'
à (..) , le cylindre peut rencontrer la division suivante, et il
est visible que la somme de toutes les parties relatives à cette
rencontre, est encore 4 r ; 8 r est donc la somme de toutes
les parties relatives à la rencontre de l' une ou l' autre des
divisions par le cylindre, dans le mouvement de son centre le
long de la perpendiculaire. Mais le nombre de tous les arcs qu'
il décrit en tournant en entier sur lui-même, à chaque point de
cette perpendiculaire, est (..) ; c' est le nombre de toutes les
combinaisons possibles ; la probabilité de la rencontre d' une
des divisions du plan par le cylindre, est donc (..) . Si l' on
projette un grand nombre de fois ce cylindre, le rapport du
nombre de fois le cylindre rencontrera l' une des divisions du
plan, au nombre total des projections, sera par le N 16, à très-
peu près, la valeur de (..) , ce qui fera connaître la valeur de la
circonférence (..) . On aura, par le même numéro, la probabilité
que l' erreur de cette valeur sera comprise dans des limites
données ; et il est facile de voir que le rapport (..) qui, pour
un nombre donde projections, rend l' erreur à craindre la plus
petite, est l' unité ; ce qui donne la longueur du cylindre égale
à l' intervalle des divisions. Concevons maintenant le plan
précédent divisé encore par des lignes perpendiculaires aux
précédentes, et équidistantes d' une quantité B égale ou plus
grande que la longueur 2 r du cylindre. Toutes ces lignes
formeront avec les premières, une suite de rectangles dont B
sera la longueur et A la hauteur. Considérons un de ces
rectangles ; supposons que dans son intérieur, on mène à la
distance R de chaque côté, des lignes qui lui soient parallèles.
Elles formeront d' abord un rectangle intérieur, dont (..) sera la
longueur, et (..) la hauteur. Ensuite deux petits rectangles, dont
R sera la hauteur, et (..) la longueur ; puis deux autres
p361
petits rectangles dont R sera la longueur, et (..) la hauteur ;
enfin, quatre petits carrés dont les côtés seront égaux à R.
Tant que le centre du cylindre sera placé dans le rectangle
intérieur, le cylindre en tournant sur son centre, ne rencontrera
jamais les côtés du grand rectangle. Lorsque le centre du
cylindre sera placé dans l' intérieur d' un des rectangles dont
R est la hauteur et (..) la longueur ; il est facile de voir par
ce qui préde, que le produit de 8 r, par la longueur (..) ,
sera le nombre des combinaisons correspondantes, dans lesquelles
le cylindre rencontrera l' un ou l' autre des côtés B du grand
rectangle. Ainsi (..) sera le nombre total des combinaisons
correspondantes aux cas dans lesquels le centre du cylindre étant
placé dans l' un ou l' autre de ces petits rectangles, le
cylindre rencontre le contour du grand rectangle. Par la même
raison, (..) sera le nombre total des combinaisons dans lesquelles
le centre du cylindre étant placé dans l' intérieur des petits
rectangles dont (..) sont les dimensions, le cylindre rencontre le
contour du grand rectangle. Il nous reste à considérer les quatre
petits carrés. Soit Abcd l' un d' eux. De l' angle A commun à
ce carré et au grand rectangle, comme centre, et du rayon R,
décrivons un quart de circonférence, se terminant aux points
Betd. Tant que le centre du cylindre sera compris dans le quart
de cercle formé par cet arc, le cylindre en tournant, rencontrera
dans toutes ses positions, le contour du grand rectangle ; le
nombre des combinaisons dans lesquelles cela aura lieu, est donc
égal au produit de (..) par la surface du quart de cercle, et par
conséquent il est égal à (..) . Si le centre du cylindre est dans
la partie du carré qui est au-delà du quart de cercle ; le
cylindre en tournant autour de son centre, pourra rencontrer l'
un ou l' autre des deux côtés Abetad prolongés, sans jamais les
rencontrer tous deux à la fois. Pour déterminer le nombre des
combinaisons relatives à cette rencontre, je conçois sur un point
quelconque du côté Ab, distant de X du point A, une
perpendiculaire Y dont l' extrémité soit au-delà du quart de
cercle. Je place le centre du cylindre sur cette extrémité de
laquelle j' abaisse quatre droites égales à R, et
p362
dont deux aboutissent sur leté Ab prolongé, si cela est
nécessaire, et deux autres sur le côté Ad pareillement prolongé.
Je nomme (..) l' angle compris entre les deux premières lignes, et
l' angle compris entre les deux secondes. Il est visible que
le cylindre en tournant sur son centre, rencontrera le côté Ab
prolon, tant qu' une de ses moitiés sera dans l' angle (..) , et
qu' il rencontre le côté Ad prolongé, tant qu' une de ses
moitiés sera dans l' angle (..) ; le nombre total des combinaisons
dans lesquelles le cylindre rencontrera l' un ou l' autre de ces
tés, est donc (..) ; ainsi ce nombre, relativement à la partie
du carré, extérieure au quart de cercle, est (..) ; or on a
évidemment, (..) ; l' intégrale pcédente devient ainsi, (..) ; et
il est facile de voir que l' intégrale relative à (..) , doit être
prise depuis (..) , et que l' intégrale relative à (..) doit être
prise depuis (..) ; ce qui donne (..) pour cette intégrale. En lui
ajoutant (..) , on aura le nombre des combinaisons relatives au
quarré ; et en quadruplant ce nombre, et le réunissant aux
nombres précédens des combinaisons relatives à la rencontre du
contour du grand rectangle, par le cylindre ; on aura, pour le
nombre total des combinaisons, (..) . Mais le nombre total des
combinaisons possibles, est évidemment égal à (..) multiplié par
la surface Ab du grand rectangle ; la probabilité de la
rencontre des divisions du plan par le cylindre, est donc (..) .
p363
de la probabilité des causes et des événemens futurs, tirée
des événemens observés. 26 la probabilité de la plupart des
événemens simples, est inconnue : en la considérant à priori
, elle nous paraît susceptible de toutes les valeurs comprises
entre zéro et l' unité ; mais si l' on a observé un résultat
composé de plusieurs de ces événemens, la manière dont ils y
entrent, rend quelques-unes de ces valeurs plus probables que les
autres. Ainsi à mesure que le résultat obser se compose par le
veloppement des événemens simples, leur vraie possibilité se
fait de plus en plus connaître, et il devient de plus en plus
probable qu' elle tombe dans des limites qui se resserrant sans
cesse, finiraient par coïncider, si le nombre des événemens
simples devenait infini. Pour déterminer les lois suivant
lesquelles cette possibilité se découvre, nous la nommerons X.
La théorie exposée dans les chapitres précédens, donnera la
probabilité du résultat observé, en fonction de X. Soit Y cette
fonction ; si l' on considère les différentes valeurs de X comme
autant de causes de ce résultat, la probabilité de X sera, par
le troisième principe du N 1, égale à une fraction dont le
numérateur est Y, et dont le nominateur est la somme de toutes
les valeurs de Y ; en multipliant donc le numérateur et le
nominateur de cette fraction par Dx, cette probabilité sera
, l' intégrale du dénominateur étant prise depuis (..) . La
probabilité que la valeur de X est comprise dans les limites (..)
, est par conséquent égale à (..) ,
p364
l' ingrale du numérateur étant prise depuis (..) , et celle du
nominateur étant prise depuis (..) . La valeur de X la plus
probable, est celle qui rend Y un maximum . Nous la
signerons par A. Si aux limites de X, Y est nul, alors
chaque valeur de Y a une valeur égale correspondante de l' autre
té du maximum . Quand les valeurs de X, considérées
indépendamment du résultat observé, ne sont pas également
possibles ; en nommant Z la fonction de X qui exprime leur
probabilité ; il est facile de voir, par ce qui a été dit dans le
premier chapitre de ce livre, qu' en changeant dans la formule,
Y dans Yz, on aura la probabilité que la valeur de X est
comprise dans les limites (..) . Cela revient à supposer toutes les
valeurs de X également possibles à priori , et à considérer
le résultat observé, comme étant formé de deuxsultats
indépendans, dont les probabilités sont Yetz. On peut donc
ramener ainsi tous les cas à celuil' on suppose à priori ,
avant l' événement, une égale possibilité aux différentes valeurs
de X, et par cette raison, nous adopterons cette hypothèse dans
ce qui va suivre.
p402
de l' influence des inégalités inconnues qui peuvent exister
entre des chances que l' on suppose parfaitement égales. 34
j' ai déjà considéré cette influence dans le N 1, où l' on a vu
que ces inégalités augmentent la probabilité des événemens
composés de la répétition des événemens simples. Je vais
reprendre ici cet objet important dans les applications de l'
analyse des probabilités. Il résulte du nuro cité, que si au
jeu de croix et pile , il existe une différence inconnue
entre les possibilités d' amener l' un ou l' autre ; en nommant
X cette différence, ensorte que (..) soit la possibilité d'
amener croix , et par conquent (..) celle d' amener pile ,
celui des deux signes (..) que l' on doit adopter étant inconnu ;
la probabilité d' amener croix N fois de suite, sera (..) . Le
jeu de croix et pile consiste, comme on sait, à projeter en
l' air une pièce très-mince, qui retombe nécessairement sur l'
une de ses deux faces opposées que l' on nomme croix et pile .
On peut diminuer la valeur de (..) , en rendant ces deux faces le
plus égales qu' il est possible. Mais il est physiquement
impossible d' obtenir une égalité parfaite ; et alors, celui qui
parie d' amener croix deux fois de suite, ou pile deux
fois de suite, a de l' avantage sur celui qui parie que dans deux
coups, croix et pile alterneront ; sa probabilité étant (..) .
p403
On peut diminuer l' influence de l' inégalité des deux faces de
la pièce, en les soumettant elles-mêmes aux chances du hasard.
signons par A cette pièce, et concevons une seconde pièce B
semblable à la première. Supposons qu' après avoir projecette
seconde pièce, on projette la pièce A pour former un premier
coup, et déterminons la probabilité que dans N coups pareils
consécutifs, la pièce A présentera les mêmes faces que la pièce
B. Si l' on nomme P la probabilité d' amener croix avec la
pièce A, et Q la probabilité d' amener pile ; si l' on
signe ensuite par (..) les mêmes probabilités pour la pièce B ;
sera la probabilité que dans un coup, la pièce A présentera
les mêmes faces que la pièce B ; ainsi ( (..) ) sera la probabilité
que cela aura lieu constamment dans N coups. Soit (..) . Mais
comme on ignore quelles sont les faces que les inégalités (..)
favorisent, la probabilité précédente peut être également (..) ,
suivant que (..) sont de même signe ou de signes contraires ; la
vraie valeur de cette probabilité est donc, (..) étant supposés
positifs, (..) . Si l' on compare cette formule à la formule ( 1),
on voit qu' elle se rapproche plus qu' elle, de (..) , ou de la
probabilité qui aurait lieu, si les faces des pièces étaient
parfaitement égales. Ainsi l' inégalité de ces faces, est par là
corrigée en grande partie : elle le serait
p404
même en totalité, si (..) était nul, ou si les deux faces de la
pièce B étaient parfaitement égales. P représentant la
probabilité de croix , avec la pièce A, et Q celle de pile
; la probabilité d' amener croix un nombre impair de fois
dans N coups, sera (..) , le signe (..) ayant lieu si N est pair,
et le signe (..) ayant lieu si N est impair. Faisant (..) , la
fonction précédente devient (..) . Si N est impair et égal à (..) ,
cette fonction est (..) ; mais comme on peut y supposer également
positif ou négatif, il faut prendre la moitié de la somme de
ses deux valeurs relatives à ces suppositions ; ce qui donne (..)
pour sa véritable valeur ; l' inégalité des faces de la pièce ne
change donc point alors la probabilité (..) d' amener croix un
nombre impair de fois. Mais si N est pair et égal à 2 i, cette
probabilité devient (..) , (..) étant l' inégalité inconnue de
probabilité entre croix et pile ; il y a donc du
désavantage à parier d' amener croix ou pile un nombre impair
de fois dans 2 i coups, et par conséquent, il y a de l'
avantage à parier d' amener l' un ou l' autre, un nombre pair de
fois. On peut diminuer ce désavantage, en changeant le pari d'
amener croix un nombre impair de fois en 2 i coups, dans le
pari d' amener dans le même nombre de coups, un nombre impair de
ressemblances entre les faces des deux pièces Aetb, projetées
comme on l' a dit ci-dessus. En effet, la probabilité d' une
ressemblance à chaque coup est, comme on l' a vu, (..) , et la
probabilité d' une dissemblance est (..) . Nommons P la première
de ces deux quantités, et Q la seconde ; la probabilité d'
amener un nombre
p405
impair de ressemblances dans 2 i coups, sera (..) . Cette
fonction reste la même, quelque changement que l' on fasse dans
les signes de (..) ; elle est donc la vraie probabilité d' amener
un nombre impair de ressemblances ; mais (..) étant de petites
fractions, on voit qu' elle se rapproche de (..) , plus que la
formule ; le désavantage d' un nombre impair est donc par là
diminué. On voit par ce qui pcède, que l' on peut diminuer l'
influence des inégalités inconnues entre des chances que l' on
suppose égales, en les soumettant elles-mêmes au hasard. Par
exemple, si l' on met dans une urne, les (..) , suivant cet ordre,
et qu' ensuite après avoir agité l' urne pour bien mêler ces
numéros, on en tire un ; s' il y a entre les probabilités de
sortie des numéros, une petite différence dépendant de l' ordre
suivant lequel ils ont été placés dans l' urne ; on la diminuera
considérablement, en mettant dans une seconde urne, ces numéros,
suivant leur ordre de sortie de la première urne, et en agitant
ensuite cette seconde urne, pour en bien ler les numéros. Alors
l' ordre suivant lequel on a placé les numéros dans la première
urne, aura extrêmement peu d' influence sur l' extraction du
premier nuro qui sortira de la seconde urne. On diminuerait
encore cette influence, en considérant de la même manière une
troisième urne, une quatrième, etc. Consirons deux joueurs
Aetb jouant ensemble, de manière qu' à chaque coup, celui qui
perd, donne un jeton à son adversaire, et que la partie dure
jusqu' à ce que l' un d' eux ait gag
p406
tous les jetons de l' autre. Soient Petq leurs adresses
respectives ; Aetb leurs nombres de jetons en commençant. Il
sulte de la formule (H) du N 10, en y faisant I infini, que
la probabilité de A, pour gagner la partie, est (..) . Si l' on
fait dans cette expression, (..) ; on aura, en prenant le signe
supérieur, la probabilité relative au cas A est plus fort que
B ; et en prenant le signe inférieur, on aura la probabilité
relative au cas où A est moins fort que B. Si l' on ignore quel
est le plus fort des joueurs, la demi-somme de ces deux
probabilités sera la probabilité de A, que l' on trouve ainsi
égale à (..) ; en changeant Aenb, et réciproquement, on aura la
probabilité de B. Si l' on suppose (..) infiniment petit ou nul ;
ces probabilités deviennent (..) ; elles sont donc
proportionnelles aux nombres des jetons des joueurs ; ainsi pour
l' égalité du jeu, leurs mises doivent être dans ce rapport. Mais
alors l' inégalité qui peut exister entre eux, est favorable au
joueur qui a le plus petit nombre de jetons ; car si l' on
suppose A moindre que B, il est facile de voir que l'
expression ( 3) est plus grande que (..) . Si les joueurs
conviennent de doubler, de tripler, etc. Leurs jetons ; l'
avantage de A augmente sans cesse, et dans le cas de Aetb
infinis, sa probabilité devient (..) ou la me que celle de B.
P étant la probabilité d' un événement composé de deux événemens
simples dont (..) sont les probabilités respectives ; si l' on
suppose que la valeur de P soit susceptible d' une inégalité
inconnue Z qui puisse s' étendre depuis (..) ; en nommant (..) la
probabilité de (..) , (..) étant fonction de Z ; on aura
p407
pour la vraie probabilité de l' événement composé, (..) , (..) étant
ce que devient P lorsqu' on y change P dans (..) , et les
intégrales étant prises depuis (..) . Si l' on n' a d' autres
données pour déterminer Z, qu' un événement observé, for des
mes événemens simples ; en nommant Q la probabilité de cet
événement, (..) étant les probabilités des événemens simples ; l'
expression précédente donne, en y changeant (..) en Q, pour la
probabilité de l' événement composé, (..) , les intégrales étant
prises ici depuis (..) ; ce qui est conforme à ce que nous avons
trouvé dans le chapitre précédent.
p412
39 déterminons maintenant la durée moyenne de la vie, qui aurait
lieu, si l' une des causes de mortalité venait à s' éteindre.
Soit U le nombre des enfans qui sur le nombre N de naissances,
vivrait encore à l' âge X dans cette hypothèse ; U étant celui
des enfans vivans à cet âge sur le même nombre de naissances,
dans le cas où cette cause de mortalité subsiste. Nommons (..) , la
probabilité qu' un individu de l' âge X, périra de cette maladie
dans l' intervalle de tems très-court (..) sera à très-peu près
par le N 25, le nombre des individus U, qui périront de cette
maladie dans l' intervalle de tems (..) , si ce nombre est
considérable. Pareillement si l' on désigne par (..) la
probabilité qu' un individu de l' âge X périra par les autres
causes de mortalité dans l' intervalle (..) sera le nombre des
individus qui périront par ces causes, dans l' intervalle de tems
; ce sera donc la valeur de (..) ; j' affecte (..) du signe (..)
; parce que U diminue à mesure que X augmente ; on a donc (..) .
En éliminant (..) de ces deux équations, on aura (..) .
p413
étant une quantité très-petite, on peut transformer la
caractéristique (..) dans la caractéristique différentielle D, et
alors l' équation précédente devient (..) ; d' où l' on tire en
intégrant, et observant qu' à l' âge zéro, (..) ; l' intégrale
étant prise depuis X nul. On peut obtenir cette intégrale, au
moyen des registres de mortalité, dans lesquels on tient compte
de l' âge des individus morts, et des causes de leur mort. En
effet, (..) étant par ce qui précède, le nombre de ceux qui,
parvenus à l' âge X, ont péri dans l' intervalle de tems (..) ,
par la maladie dont il s' agit ; on aura à très-peu près l'
intégrale (..) , en supposant (..) égal à une année, et en prenant
depuis la naissance des N enfans que l' on a considérés, jusqu'
à l' année X, la somme des fractions qui ont pour numérateur le
nombre des individus que la maladie a fait périr chaque année, et
pour dénominateur, le nombre des N enfans qui vivent encore au
milieu de la même ane. Ainsi l' on pourra transformer au moyen
de l' équation ( 3), une table de mortalité ordinaire, dans
celle qui aurait lieu, si la maladie dont il s' agit, n' existait
pas. La petite vérole a cela de particulier, savoir, que le même
individu n' en est jamais deux fois atteint, ou du moins ce cas
est si rare, que s' il existe, on peut en faire abstraction.
Concevons que sur un très-grand nombre N d' enfans, U
parviennent à l' âge X, et que dans le nombre U, Y n' aient
point eu la petite vérole. Concevons encore que sur ce nombre Y,
Iydx prennent cette maladie dans l' instant Dx, et que sur ce
nombre, (..) périssent de cette maladie. En désignant, comme ci-
dessus, par (..) la probabilité de périr à l' âge X, par d'
autres causes ; on aura évidemment (..) . En effet, Y diminue par
le nombre de ceux qui, dans l' instant Dx,
p414
prennent la petite vérole, et ce nombre est par la supposition,
Iydx. Y diminue encore par le nombre des individus compris dans
Y, qui rissent par d' autres causes, et ce nombre est (..) .
Maintenant, si de la première des deux équations précédentes,
multipliée par Y, on retranche la seconde multipliée par U, et
si l' on divise la différence par (..) , on aura (..) ; ce qui donne
, en intégrant depuis X nul, et observant qu' à cette origine,
; cette équation fera connaître le nombre d' individus de l' âge
X, qui n' ont point encore eu la petite vérole. On a ensuite (..)
, Zdx étant, comme ci-dessus, ceux qui périssent dans le tems
Dx, de la maladie que l' on considère. En substituant au lieu de
, sa valeur précédente ; on aura, après avoir intégré, (..) .
Cette valeur de U suppose que l' on connaît par l' observation
Ietr. Si ces nombres étaient constans, il serait facile de les
déterminer ; mais comme ils peuvent varier d' âge en âge, les
élémens de la formule ( 3) sont plus ais à connaître, et cette
formule me semble plus propre à déterminer la loi de mortalité
qui aurait lieu, si la petite vérole était éteinte. En lui
appliquant les données que l' on a pu se procurer sur la
mortalité causée par cette maladie, aux
p415
divers âges de la vie ; on trouve que son extinction au moyen de
la vaccine, augmenterait de plus de trois années, la durée de la
vie moyenne, si d' ailleurs cette durée n' était point restreinte
par la diminution relative des subsistances, due à un plus grand
accroissement de population. 37 considérons présentement la
durée moyenne des mariages. Pour cela concevons un grand nombre
N de mariages entre N garçons de l' âge A, et N filles de l'
âge (..) ; et déterminons le nombre de ces mariages subsistans
après X années écoulées depuis leur origine. Nommons (..) la
probabilité qu' un garçon qui se marie à l' âge A, parviendra à
l' âge (..) ; et (..) la probabilité qu' une fille qui se marie à
l' âge (..) , parviendra à l' âge (..) . La probabilité que leur
mariage subsistera après sa Xième année, sera (..) ; donc si l'
on développe le binome ( (..) ), le terme (..) de ce développement,
exprimera la probabilité que sur les N mariages, I subsisteront
après X années. Le plus grand terme du développement est, par le
N 16, celui dans lequel I est égal au plus grand nombre entier
contenu dans (..) ; et par le même numéro, il est extrêmement
probable que le nombre des mariages subsistans ne s' écartera que
très-peu en plus ou en moins de ce nombre. Ainsi, ensignant
par I, le nombre des mariages subsistans ; on pourra supposer à
très-peu près, (..) . (..) est à fort peu près le nombre des N
maris vivans à l' âge (..) . Les tables de mortalité le feront
connaître d' une manière fort approchée, si elles ont été formées
sur des listes nombreuses de mortalité ; car si l' on désigne par
le nombre des hommes vivans à l' âge A, sur l' ensemble de
ces listes, et par (..) le nombre des survivans à l' âge (..) ; on
aura à fort peu près, par le N 29, (..) . Si l' on nomme
pareillement (..) le nombre des femmes vivantes à l' âge (..) , et
par (..) le nombre des survivantes à l' âge (..) ; on
p416
aura à très-peu près, (..) . On formera ainsi d' année en année,
une table des valeurs de I. En faisant ensuite une somme de tous
les nombres de cette table, et en la divisant par N ; on aura la
durée moyenne des mariages faits à l' âge A pour les garçons, et
à l' âge pour les filles. Cherchons maintenant la probabilité
que l' erreur de la valeur précédente de I, sera comprise dans
des limites données. Supposons pour simplifier le calcul, que les
deux conjoints soient du même âge, et que la probabilité de la
vie des hommes soit la même que celle des femmes ; alors on a (..)
; et l' expression précédente de I devient (..) . Concevons que la
valeur de I soit (..) ; S sera l' erreur de cette expression de
I. On a vu dans le N 30, que si l' on a obserque sur un très
-grand nombre P d' individus de l' âge A, Q sont parvenus à l'
âge (..) ; la probabilité que sur (..) autres individus de l' âge
A, (..) parviendront à l' âge (..) , est (..) . Si l' on suppose
Petq infinis, on aura évidemment (..) ;
p417
on aura (..) ; ce qui donne à très-peu près, engligeant le
carré (..) ; ainsi la probabilité précédente de Z, est en même
tems la probabilité de cette expression de (..) . Supposons
maintenant (..) ; en considérant le binome ( (..) ), la probabilité
de cette expression de I est par le N 16, (..) . Mais la valeur
précédente de I devient, en y substituant pour (..) sa valeur,
; la probabilité de cette dernière expression de I est égale au
produit de celles de I et de Z, trouvées ci-dessus ; elle est
donc égale à (..) . Ayant supposé précédemment (..) , on aura (..) ;
en substituant donc pour L sa valeur tirée de cette équation, et
observant que l' on a à très-peu près (..) ; on aura pour la
probabilité que la valeur de S sera comprise dans des limites
données, l' expression intégrale (..) , l' intégrale relative à Z
pouvant être prise depuis (..) .
p418
De là il est facile de conclure par les méthodes exposées
précédemment, que si l' on fait (..) , l' intégrale étant prise
depuis S nul. L' analyse précédente s' applique également à la
durée moyenne d' un grand nombre d' associations fores de trois
individus, ou de quatre individus, etc. Soit N ce nombre, et
supposons que tous les associés soient dume âge A au moment
de l' association ; désignons par P le nombre des individus de
la table de mortalité, de l' âge A, et par Q le nombre des
individus de l' âge (..) ; le nombre I des associations
existantes après X années écoulées depuis l' origine des
associations, sera à fort peu ps (..) , R étant le nombre des
individus de chaque association. On trouvera par la même analyse,
la probabilité que ce nombre sera renfermé dans des limites
données. La somme des valeurs de I correspondantes à toutes les
valeurs de X, divisée par N, sera la durée moyenne de ce genre
d' associations.
Livros Grátis
( http://www.livrosgratis.com.br )
Milhares de Livros para Download:
Baixar livros de Administração
Baixar livros de Agronomia
Baixar livros de Arquitetura
Baixar livros de Artes
Baixar livros de Astronomia
Baixar livros de Biologia Geral
Baixar livros de Ciência da Computação
Baixar livros de Ciência da Informação
Baixar livros de Ciência Política
Baixar livros de Ciências da Saúde
Baixar livros de Comunicação
Baixar livros do Conselho Nacional de Educação - CNE
Baixar livros de Defesa civil
Baixar livros de Direito
Baixar livros de Direitos humanos
Baixar livros de Economia
Baixar livros de Economia Doméstica
Baixar livros de Educação
Baixar livros de Educação - Trânsito
Baixar livros de Educação Física
Baixar livros de Engenharia Aeroespacial
Baixar livros de Farmácia
Baixar livros de Filosofia
Baixar livros de Física
Baixar livros de Geociências
Baixar livros de Geografia
Baixar livros de História
Baixar livros de Línguas
Baixar livros de Literatura
Baixar livros de Literatura de Cordel
Baixar livros de Literatura Infantil
Baixar livros de Matemática
Baixar livros de Medicina
Baixar livros de Medicina Veterinária
Baixar livros de Meio Ambiente
Baixar livros de Meteorologia
Baixar Monografias e TCC
Baixar livros Multidisciplinar
Baixar livros de Música
Baixar livros de Psicologia
Baixar livros de Química
Baixar livros de Saúde Coletiva
Baixar livros de Serviço Social
Baixar livros de Sociologia
Baixar livros de Teologia
Baixar livros de Trabalho
Baixar livros de Turismo