ses approvisionnemens en argent, en grains, en
bestiaux, fût-ce même en fumier, jusqu' à former une
valeur égale à celle avec laquelle il a commencé
l' année d' auparavant.
On voit que, bien que presque toutes les parties du
capital aient reçu des atteintes, et que quelques-unes
aient même été anéanties tout-à-fait, le capital a
néanmoins été conservé ; car un capital ne consiste pas
en telle ou telle matière, mais en une valeur qui
n' est pas altérée toutes les fois qu' elle reparaît en
d' autres matières d' une égale valeur.
On conçoit même aisément, si cette terre a été assez
vaste et son exploitation conduite avec assez d' ordre,
d' économie et d' intelligence, que les profits du
cultivateur, après que son capital a été rétabli dans
son entière valeur, et que toutes ses dépenses et
celles de sa famille ont été payées, lui aient fourni
un excédant à mettre de côté. Les conséquences qui
résulteront de l' emploi de cet excédant sont fort
importantes, et feront la matière du chapitre suivant.
Il suffit, quant à présent, de bien concevoir que la
valeur du capital, quoique consommée, n' est point
détruite, parce qu' elle a été consommée de manière à
se reproduire, et qu' une entreprise peut se perpétuer
et donner tous les ans de nouveaux produits avec le
même capital, quoiqu' il soit consommé sans cesse.
Après avoir suivi les transformations que subit un
capital dans l' industrie agricole, on suivra sans
peine les transformations qu' il subit dans les
manufactures et le commerce.
Dans les manufactures, il y a, comme dans l' agriculture,
des portions du capital qui durent plusieurs années,
comme les bâtimens des usines, les machines et
certains outils, tandis que d' autres portions changent
totalement de forme ; c' est ainsi que les huiles, la
soude, que consomment les savonniers, cessent d' être
de l' huile, de la soude, pour devenir du savon. C' est
ainsi que les drogues pour la teinture cessent d' être
de l' indigo, du bois d' Inde, du rocou, et font partie
des étoffes qu' elles colorent. Les salaires et
l' entretien des ouvriers sont dans le même cas.
Dans le commerce, la presque totalité des capitaux
subit, et souvent plusieurs fois par année, des
transformations complètes. Un négociant, avec des
espèces, achète des étoffes et des bijoux : première
transformation. Il les envoie à Buenos-Ayres, où on
les vend : seconde transformation. Il donne ordre d' en
employer le montant en peaux d' animaux : troisième
transformation. Cette marchandise, arrivée au lieu de
sa destination, est vendue à son tour ; la valeur en
est remise en effets de commerce sur Paris ; et ces
valeurs, changées en espèces, reproduisent le