nouvelles ne s' est jamais ralentie. Dans les contrées de l'
ouest ou du centre de la France, les noms des anciens peuples,
Poitou, Limousin, Berry, etc., persistent sur les lieux qu'
ils ont jadis occupés : dans cette arène ouverte au voisinage de
la mer du Nord, les noms, à peu d' exceptions près, ont été
renouvelés. Cette mer qui s' ouvre au nord des falaises de Gris-
Nez et de Douvres, avec ses pêcheries, ses estuaires, ses
Foehrden, ses Sunds, ses Viks, ses îles, n' est entrée que
relativement tard dans l' histoire. Nous recueillons chez les
auteurs classiques l' impression encore fraîche de sa découverte.
à l' époque où elle commençait pourtant à
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attirer l' attention politique, au premier siècle de notre ère,
Pline a pour désigner ses rives et ses riverains, " pauvres
hères qui brûlent à des feux de tourbe leur nourriture et leur
ventre raidi par le froid " , des expressions qui nous feraient
penser aux parages d' Alaska et des îles Aléoutiennes.
Cependant, de plus en plus peuplée sur ses rives, envahie par les
navigateurs du nord, elle ne devait pas tarder à mériter le nom
de mer germanique. Quelque amélioration dans le mode de
construction des navires fut sans doute l' humble origine de
cette révolution, qui eut pour effet de constituer, autour de la
mer du Nord, une forme nouvelle du germanisme, la plus
envahissante de toutes, le germanisme maritime et insulaire. Ce
germanisme, dans la partie qui nous touche de près, aboutit à la
création de la Flandre et de l' Angleterre. Nous étudierons
plus loin la Flandre. Notons seulement ici que, par ses attaches
maritimes, par ses relations avec le nord de l' Europe, elle
représente une formation politique de type nouveau. Elle rompt
avec les anciens centres politiques du pays, ceux de l' époque
romaine : Tournai, Térouanne ; elle leur en substitue d' autres
, voisins de la mer : Thourout, Bruges, Gand. L' invasion au
vie siècle des anglo-saxons, venus de l' Elbe inférieur,
produisit la substitution d' une Angleterre germanique à une
Bretagne celtique ; et ce fut un phénomène très net de
colonisation maritime. Lorsqu' on observe la répartition des
tribus jutes, anglaises, saxonnes qui s' établirent le long des
côtes depuis le Forth jusqu' au Sussex, il semble qu' on ait
sous les yeux la bande de colonies anglaises, scandinaves,
hollandaises qui s' échelonnèrent, au xviiie siècle, le long des
côtes orientales de l' Amérique du Nord. C' est toujours avec
la préoccupation de garder le contact de la mer, par conséquent
le long du littoral, que se développent les colonisations. Les
unes, comme celles des grecs ou plus tard celles des germains et
des suédois de la Baltique, restent littorales. Mais dans la
grande île bretonne il n' en fut pas ainsi. La possession des
côtes orientales mettait aux mains des envahisseurs germains les
fleuves, les parties les plus fertiles et les plus ouvertes, l'
axe même de la contrée. Des germes déposés le long des côtes
naquit donc un état, l' Angleterre ; et ce fut, à la place du